Succès surprise du Festival de Cannes, Toni Erdmann ne figurait pas au palmarès. Peu importe, dit la réalisatrice allemande, qui arrive en septième place de notre top 20 des films de l’année.
Ovation
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L’accueil de Toni Erdmann au Festival de Cannes était totalement imprévisible. Je me disais que les réactions seraient partagées, comme pour mes films précédents. Je ne m’attendais pas à cet enthousiasme général. L’humour est un registre tellement particulier, individuel…
Et puis je ne savais pas si le film serait perçu plutôt comme une comédie ou plutôt comme un drame, parce qu’il est un mélange des deux. Le registre comique de Toni Erdmann est très spécial car c’est le personnage du père qui veut faire rire sa fille, plutôt que moi qui veut faire rire le public : c’est de l’humour indirect.
L’accueil à Cannes m’a réjouie, puis fait douter. J’ai eu peur que le film ne soit “survendu”, qu’il perde de son impact sur le long terme ou que les spectateurs n’attendent que la scène de nudité. Il est toujours bon de découvrir un film sans en être trop informé en amont.
Compétition
Je n’ai pas de regrets. Je n’ai pas été déçue par l’absence de Toni Erdmann au palmarès parce qu’être en compétition était déjà une victoire pour moi et pour le cinéma allemand. Et puis, comment peut-on classer des films ? Tout cela est tellement subjectif… Le cinéma n’est pas le football ! Chaque cinéaste se bat avec lui-même et avec son travail, pas contre les autres.
Sceptique au sujet des prix, je n’attendais donc rien. Tout le monde m’en parlait, moi, je suis partie en vacances ! Quand on fait un film, on ne pense pas à la Palme d’or. Sinon, les réalisateurs ne feraient que des mauvais films. Bien reçu en Allemagne, Toni Erdmann a fait 750 000 entrées et est toujours à l’affiche, ce qui est remarquable pour un film d’auteur dans un pays qui n’est pas autant cinéphile que la France.
En 2016, ma boîte a aussi produit le nouveau film de Radu Jude, Scarred Hearts. Notre politique consiste à produire des cinéastes avec un univers fort, des films que nous avons envie de voir comme ceux de Radu, de Miguel Gomes ou de Valeska Grisebach. On ne vise pas une part de marché, ça ne fonctionne pas comme ça, on produit en se basant sur nos goûts.
Conviction
En dehors du cinéma, l’année a hélas été riche en actualités choquantes, entre la guerre en Syrie, le Brexit, l’élection de Trump. Je crains que tous ces événements soient liés par un état général du monde. Récemment, j’ai pu faire un discours au Parlement européen, à Strasbourg, c’était très émouvant.
Je me sens pleinement une cinéaste européenne, une citoyenne européenne, et cet idéal d’une Europe unie est fondamental. Peut-être que l’élection de Trump va faire prendre conscience à nos leaders politiques que le projet européen est une chose précieuse et nécessaire. En tout cas, c’est ce que j’espère.
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