Avec “Blood of the Virgin”, l’Américain Sammy Harkham nous entraîne dans un tourbillon d’émotions (et de loups-garous) dans l’excitant Los Angeles des seventies.
Après avoir fini Blood of the Virgin, Robert Crumb était persuadé – à tort – que son auteur avait le même âge que lui et vécu en direct les seventies. Art Spiegelman, lui, a estimé qu’il fallait le lire au moins trois fois pour l’apprécier pleinement. Ce à quoi Sammy Harkham lui a répondu : “ce n’est pas une mauvaise chose, non ?”
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
À 42 ans, le dessinateur, qui n’avait publié jusque-là que des histoires courtes, signe avec Blood of the Virgin un premier roman graphique aussi entraînant que riche, à la fois reconstitution du Los Angeles des 70’s, plongée dans le cinéma bis ou Z hollywoodien et histoire d’amour compliquée. On y suit en effet la relation entre Seymour, juif né en Irak, rêvant de faire son trou à Hollywood et Ida, originaire de Nouvelle-Zélande et pas très enchantée à l’idée de devoir élever seule leur enfant de 10 mois. Son compagnon se donne entièrement au cinéma au détriment de sa vie de famille, encore plus quand il a l’occasion de réaliser un film de loup-garou fauché – celui qui donne son titre au livre.
Dans la vie des protagonistes
Prépublié pendant près de douze ans dans le comic book Crickets et l’anthologie dirigée par Harkham, Kramers Ergot, Blood of the Virgin séduit par sa narration fluide et sa faculté à nous propulser avec naturel dans la vie des protagonistes. Comme chez ses compatriotes Chris Ware ou Frank King, l’auteur de la série culte Gasoline Alley, les compositions d’Harkham suivent au plus près les gestes du quotidien pour mieux camper les personnages.
Le dessinateur quadragénaire se permet aussi des libertés qui ne se révèlent jamais gratuites. Ainsi, en un chapitre très coloré, il brosse le destin d’un cow-boy blanc devenu un ponte d’Hollywood, soulignant en creux les difficultés rencontrées par Seymour, l’outsider venu d’ailleurs, une situation vécue par le père de Sammy venu d’Irak avec l’envie, lui, d’intégrer l’industrie du prêt-à-porter. Dans la dernière ligne droite de cette BD, l’auteur retrace même en plusieurs dizaines de pages bouleversantes le passé de la mère d’Ida, survivante des camps de concentration.
Blood of the Virgin de Sammy Harkham (Cornélius), 304p.,35,50€, traduction de l’anglais (Etats-Unis) par Eric Moreau. En librairie.
{"type":"Banniere-Basse"}