Dix ans après un virage militant au sein de The Knife, Karin Dreijer peine à retrouver sa pertinence sur son nouvel effort.
En 2013, The Knife donnait suite à la pièce maîtresse de sa discographie (l’intouchable Silent Shout, 2006) avec l’hyper-exigeant Shaking the Habitual, soit 1 h 36 de musique inclassable, oscillant de la synthpop (A Tooth for an Eye, inoubliable intro) au drone (le cryptique Fracking Fluid Injection).
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Sous la forme d’un geste anticonformiste au titre idoine, ce cinquième album était autant la faste épitaphe du duo qu’elle formait avec son frère – dissous depuis – que le produit d’une technique irréprochable mise au service d’un propos militant, anticapitaliste, antiraciste et féministe.
Une production irréprochable pour une déception indéniable
Une décennie plus tard, après que son activisme s’est étoffé avec Plunge (2017), son deuxième long format qui explorait plus par l’intime les questions de genre et de sexualité, Karin Dreijer – de son vrai nom – continue de vouloir dynamiter les structures hétéropatriarcales autour desquelles s’articulent les désirs.
C’est en tout cas ce que faisait miroiter What They Call Us, manuel de survie queer en milieu professionnel (le titre fait référence aux rumeurs écartant les employé·es LGBTQI+ des métiers de bureau) et premier extrait de Radical Romantics, davantage en tout cas que le single Carbon Dioxide, apologie d’un amour plus serein mais pas moins charmant.
Avis aux nostalgiques du Nine Inch Nails des années 1990
C’est à l’écoute du reste du disque que le doute s’installe alors qu’on a l’impression d’entendre les faces B de Plunge : le finale Bottom of the Ocean a même déjà eu droit à une discrète parution sur une compilation en 2011 (We Are the Works in Progress, curatée par Blonde Redhead).
Si la production est irréprochable, on regrette la sagacité et la profondeur des compositions auxquelles Fever Ray avait habitué son public, en dépit de la présence de Trent Reznor et Atticus Ross, à la production d’Even It Out (avis aux nostalgiques du Nine Inch Nails des années 1990) et North. En peinant à amalgamer un versant pertinent de sa palette à son registre militant, Fever Ray fait de Radical Romantics une suite dispensable, plus nostalgique que romantique, et pauvrement radicale.
Radical Romantics (Rabid Records/PIAS). Sortie le 10 mars. Concert le 25 août à Saint-Cloud (Rock en Seine).
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