Depuis dimanche soir, moment de sa diffusion américaine, il est question partout sur Internet du troisième épisode de “The Last of Us”. La nouvelle série HBO adaptée du jeu vidéo éponyme, située dans un monde postapocalypse, s’est offert l’un de ces rares moments de communion mondiale autour d’une histoire toute simple d’amour et de survie. Mike Flanagan, le créateur de “The Hauting”, a réagi sur son compte Twitter : “C’est l’un des plus beaux épisodes de série que j’ai jamais vu.”
Le recul manque, mais l’impact immédiat de ces 76 minutes à la fois saisissantes et surprenantes est proche de certains sommets de The Leftovers. Elles partagent d’ailleurs avec la série endeuillée de Damon Lindelof le compositeur Max Richter, auteur de nappes frémissantes et profondes.
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On spoilera celles et ceux qui n’ont pas encore pu s’y plonger, mais tant pis. Pour la première fois depuis le début de sa cavalcade, The Last of Us marque une pause. Dans ses deux premiers épisodes, elle installait l’histoire d’une humanité désolée après l’apparition d’un virus transformant une partie de la population en zombies. De ce chaos émergeait un père endeuillé et une orpheline, Joel et Ellie. Il et elle apparaissent dans l’épisode 3 pour en disparaître, laissant place à une parenthèse à la fois minimale et ample, centrée sur la rencontre entre Bill et Frank, des personnages que nous croisons pour la première fois. Le récit de leur amour se déploie pendant vingt ans, jusqu’à la fin. Son titre : Long, Long Time.
Long, Long Time
Dans le jeu vidéo, Bill et Frank n’avaient pas cette importance. Craig Mazin et Neil Druckmann ont décidé de donner à la série son indépendance en creusant et transformant ce qui n’était qu’un appendice. Cet épisode réalisé par le britannique Peter Hoar (It’s a Sin) fait appel aux beautés éternelles du mélo – l’amour, la mort, toute honte bue – dans une version gay peu habituelle. Quelques plans inoubliables (un trou béant, une fenêtre, des fraises) nous serrent le cœur, cette idée que la plus grande beauté peut se nicher dans une immense catastrophe nous remue. The Last of Us révèle ce qu’elle a dans le ventre. On ignore si cela durera jusqu’à la fin – neuf épisodes sont prévus –, mais l’événement a eu lieu.
Au-delà de l‘émotion, si cet épisode 3 marque les esprits, c’est aussi parce qu’il invente une rupture dans le flot de la narration et dans le grand ordonnancement des séries contemporaines. Dans les années 2010, ce genre d’échappée belle via des épisodes hors cadre était fréquent, mais l’emprise des plateformes sur les modes de récits propices au binge-watching a rendu cela plus rare. Euphoria a glissé aussi par moments entre le récit linéaire et la parenthèse. The Last of Us le fait avec davantage de candeur. Elle nous rappelle avec cet épisode que tout est possible, dans une série comme dans la vie.
The Last of Us de Craig Mazin et Neil Druckmann – sur Prime Video
Édito initialement paru dans la newsletter Séries du 1er février. Pour vous abonner gratuitement aux newsletters des Inrocks, c’est ici !
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