Pas de réel espoir au QG de François Fillon. Une nuit de défaite ou le gâchis a longtemps fait écho. Le parti de la droite a déjà les yeux rivés sur les législatives.
A 20 heures, plus grand monde n’y croyait vraiment encore. Les rares militants qui ont fait le déplacement au QG de François Fillon ont déjà trinqué aux jours meilleurs depuis de longues minutes déjà. Le champagne est resté au frais : on se partage des bouteilles de brouilly, de côtes-du-rhône ou de la mauvaise bière. Dans la moiteur à la fois glaciale et suffocante de la rue Firmin-Gillot, un mot revient en chœur : le gâchis. Si certains militants pointent encore la responsabilité des médias, on n’hésite plus à parler de « campagne cauchemar » et de « catastrophe” depuis que Le Canard enchaîné a fait ses révélations le 25 janvier.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Il n’y eut ni cris ni pleurs au moment du verdict des premières estimations. Avec un peu moins de 20 % des voix, François Fillon n’est pas qualifié pour le second tour de l’élection présidentielle. Il est devancé par Emmanuel Macron et Marine Le Pen, et joue du coude-à-coude avec Jean-Luc Mélenchon. François Fillon vient de terminer une réunion avec plusieurs cadres du parti Les Républicains (Nathalie Kosciusko-Morizet, Eric Woerth, Christian Jacob, Jean-François Copé, François Baroin, Roger Karoutchi ou Hervé Mariton). Une demi-heure plus tard, le candidat de la droite et du centre, dans un discours bref et poignant, remercie ceux qui ont fait le déplacement, sans oublier de dénoncer « les obstacles trop nombreux et trop cruels », qui ont ôté, selon lui, une victoire promise à la droite.
« Fillon est le seul responsable de sa défaite »
Dans les rangs d’une salle sans âme, les avis divergent pourtant : « Il avait un boulevard. Mais il ne faut pas se chercher d’excuses, témoigne Julien, la trentaine, qui a défendu le programme de redressement national de son candidat pendant un an, sur le terrain. Vous savez, on a les politiques qu’on mérite, qui aiment flirter avec la ligne jaune », ajoute-t-il avec la jauge du dépit à son maximum. « Fillon est le seul responsable de sa défaite, la presse et la justice ont fait leur travail », ajoute Estelle, quinqua dépitée, ses yeux bleus embués de larmes.
“Cette défaite est la mienne”, a d’ailleurs confirmé François Fillon, rarement aussi lucide lors de son allocution. Après Sarkozy (deux fois) et Alain Juppé, il confirme que les discours des candidats de la droite ne sont jamais aussi forts que dans les soirs de défaite.
Mais rapidement la tristesse laisse place à la colère. « J’espère de tout cœur que Dupont-Aignan fera 4,98 % », explique un jeune militant. Crédité de presque 5 %, il est considéré par beaucoup comme le« Christiane Taubira de la droite », référence à l’élection de 2002. Pour un autre, pragmatique, cette défaite va permettre d’écarter Sens commun de la direction du parti : « Ils ont agi comme un repoussoir pour certains de nos électeurs. J’espère qu’il retourneront dans le néant duquel ils viennent. »
Très peu de responsables de cette émanation politique du mouvement de La Manif pour tous étaient présents ce soir. D’ailleurs ils ont choisi de ne pas suivre le choix de François Fillon de voter pour Emmanuel Macron, au second tour. Rares sont ceux à appeler au vote pour le candidat d’En Marche ! face à Marine le Pen.
« Le Pen ou Macron, c’est le choix entre le chaos et le pourrissement » par le président de @SensCommun_ https://t.co/UUrpg3rI6E pic.twitter.com/PkWpNPVgRf
— Famille Chrétienne (@FChretienne) April 23, 2017
« On a beaucoup trop parlé de notre camp et pas assez des Français »
De manière générale, peu d’élus LR ont choisi de rester sur place pour assurer le service après-vente. Mais ils n’ont pas la langue dans leur poche. « On a beaucoup trop parlé de notre camp et pas assez des Français, juge sévèrement ce rare fidèle, pourtant pas un filloniste de la première heure. Les affaires nous ont fait très mal mais il ne faut pas tout polariser dessus. On n’a pas été capable de nous situer au carrefour des droites. »
Pour un autre, plus mesuré : « On a porté un projet puissant mais qui n’a jamais pu être entendu correctement. Nous portons tous une part de responsabilité. »
Il reste désormais au camp des Républicains à limiter la casse, avec en vue les élections législatives des 11 et 18 juin prochain. Si François Fillon n’a pas annoncé son départ, personne n’imagine qu’il soit capable de mener la bataille. « Cette nuit les couteaux seront de sortie », promet un membre du bureau politique. Demain, deux réunions d’importance doivent se tenir, une dans le QG de François Fillon, l’autre chez Le Républicains, à quelques centaines de mètres seulement.
Laurent Wauquiez se positionne déjà
« C’est une élection à quatre tours. Nous avons pour objectif de former le plus gros groupe de l’Assemblée nationale », explique un cadre à un poignée de journalistes. Quelqu’un lui demande s’il vise une éventuelle majorité absolue « N’oubliez pas qu’on a perdu », lui répond-il, entre dépit et lucidité. François Baroin et Laurent Wauquiez sont les noms qui reviennent le plus. Le second qui, avant même la prise de parole de son candidat déchu, a déclaré sur France 2 : « On doit mettre le cap sur les législatives. Moi je vais m’engager totalement pour garder l’unité de notre famille politique avec tout le monde et surtout se battre pour ces législatives parce qu’on a pas le droit de perdre précisément au nom de nos convictions. »
{"type":"Banniere-Basse"}