Kitty et Red Forman sont de retour. “That ’90s Show”, la suite de “That ’70s Show” est arrivée sur Netflix, 17 ans après la fin de la série culte. Une nouvelle sitcom pourtant très décevante.
Dans le cinquième épisode de That ’90s Show, une mère et sa fille adolescente tournent autour du sujet sexuel, sans vraiment réussir à formuler la chose. Devant cet échec basé sur la gêne, la plus jeune se souvient de leurs conversations quand elle était enfant, à base de périphrases et de métaphores. L’adulte prévient : “cette fois, on va utiliser les vrais mots”.
La séquence se termine de cette manière, et ce n’est que plus tard dans le récit que nous les retrouvons, pour enfin connaître la suite. Mère et fille échangent alors autour de l’idée qu’il ne faut pas pénétrer le vagin après l’anus, pour des raisons d’hygiène. Donc, les choses vont assez loin. Sauf que ce sont à nouveau des expressions indirectes qu’utilisent les deux femmes. Et l’effet, loin d’être choquant ou même pédagogique, se révèle assez plat…
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Les limites de That ’90s Show s’inscrivent dans cet échange charmant, mais limité. Nous sommes devant une sitcom presque hilarante, presque subversive – on n’est parfois pas si loin de la “stoner comedy”, la comédie de fumette – mais qui recule devant les obstacles et met en scène ces reculs pour espérer s’en sortir avec une blague. Pour celles et ceux qui n’auraient pas vécu comme spectateur·trices entre 1998 et 2006, on rappellera que That ’70s Show fut une comédie phare de la télé US avec Ashton Kutcher et Mila Kunis, où des ados tournaient en rond dans une cave aménagée en salle de jeu et de joints, tandis qu’un couple de parents old school, Red et Kitty, les surveillaient ou les soutenaient, selon les jours.
Rires enregistrés et joints sur le canapé
Vingt ans plus tard, les parents sont devenus un couple de vieux grands-parents attachants, même si le mâle reste un bougon réac. Et les ados de That ’90s Show sont les enfants que les kids de la série originelle ont mis au monde entretemps. Une apparition d’Ashton et Mila n’y changera rien : il faut s’habituer à vivre sans ce petit groupe amusant – on croise aussi Topher Grace – qui jouait les solides seconds rôles à l’époque des sitcoms reines, Friends et Seinfeld en tête. Aujourd’hui, les sitcoms, pourtant un genre majeur et pionnier de la télévision américaine, se retrouvent noyées dans la masse des “contenus” mondialisés, et leur charme particulier, fait de domesticité et de répétition, a perdu de son cachet.
En jouant la carte du classicisme – les rires enregistrés en direct sont à nouveau présents –, That ’90s Show se devait de chercher le plus haut niveau d’écriture possible. C’est malheureusement une certaine paresse qui l’emporte, alors que le concept de base consistant à filmer l’ennui dans une petite ville américaine reste toujours potentiellement fort. Quelques moments surnagent comme les apparitions de la géniale et déjantée Andrea Anders, ou le coming out assez fin de l’ado asiatique de la bande, mais la déception l’emporte. Surtout, la matière-même des années 1990, faite d’un étrange mélange d’espoir et de rébellion grunge, se trouve seulement effleurée. De là à dire que c’était mieux avant, il n’y a qu’un pas, que l’on franchira allègrement ici. L’amour des sitcoms le vaut bien.
That ’90s Show sur Netflix de Bonnie Turner, Lindsey Turner, Gregg Mettler avec Debra Jo Rupp, Kurtwood Smith, Callie Haverda
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