Même si ses œuvres fleurissent sur les murs, Invader n’est pas un graffiti artist à strictement parler. Il n’utilise ni bombe de peinture ni markers, mais des carreaux de mosaïque colorés qui lui servent à inventer ses petits individus cosmiques. Cela fait maintenant dix ans que ses curieux personnages pixelisés, reprenant le design des héros […]
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Même si ses œuvres fleurissent sur les murs, Invader n’est pas un graffiti artist à strictement parler. Il n’utilise ni bombe de peinture ni markers, mais des carreaux de mosaïque colorés qui lui servent à inventer ses petits individus cosmiques. Cela fait maintenant dix ans que ses curieux personnages pixelisés, reprenant le design des héros du jeu vidéo seventies Space Invaders envahissent les villes. Paris, ville où réside incognito l’artiste, fut la première à être envahie, suivie par Los Angeles, New York, Londres, Montpellier, Mombasa… S’il reste attaché à l’invasion sauvage des lieux, Invader expose aussi parallèlement en galeries et musées, diversifiant son œuvre et s’attaquant, toujours à l’aide de mosaïques et de pixels, à des figures iconiques de la culture (Rubik’s Cube, Orange mécanique…). Le choix de ses destinations se fait suivant ses envies ou les opportunités. “Souvent quand je suis invité à exposer dans une galerie, un musée ou un centre d’art, j’explique qu’il faut que je sois là avant pour mettre en place l’installation. En fait c’est pour être sur place quinze jours avant et envahir la ville,” explique-t-il.
Ces invasions ne sont d’ailleurs pas toujours simples. Effectuées le plus souvent de nuit par souci d’anonymat, elles ont déjà conduit l’artiste à avoir des démêlés avec habitants et police. “A la fin des années 90 il y avait une surenchère de graffitis, et les autorités et la population sont arrivées à un degré zéro de tolérance. Aujourd’hui, qu’on colle un autocollant, une affiche, ou pire qu’on peigne sur un mur, c’est vraiment mal perçu par une grande partie de la population. Il m’est souvent arrivé de devoir passer une nuit au poste ou démonter une pièce. Souvent je la retire et je vais la remettre le lendemain.”
Des problèmes qui ne se sont pas posés lors de ses deux dernières invasions, totalement autoproduites, à Katmandou au Népal (choisie pour sa sonorité, son exotisme et l’imaginaire seventies qu’elle véhicule), et Bénarès en Inde. “Il n’y avait pas un graffitti, pas une pièce de street art, c’est un territoire vierge, et c’est très excitant. L’accueil de la population est très différent, les gens ne sont pas sur leur garde par rapport à une intervention urbaine. Ils apprécient parce qu’ils voient que j’utilise un matériau assez précieux, pas juste une bombe de peinture.” Invader s’adapte aux pays et à Bénarès, ses personnages ont six bras et un point rouge entre les deux yeux – son interprétation de Shiva. A Katmandou, ville où les rues n’ont pas de nom, il a travaillé avec Google Maps pour se repérer et a édité une carte de l’invasion dont les profits de la vente iront aux Tibétains en exil y habitant.
Si à ses débuts, il informait les fans par faxes et mails de la fin des invasions (“par une espèce de superstition, je ne donne jamais les lieux de mes invasions avant”), il donnera dorénavant en avant-première des nouvelles de ses invasions alors que celles-ci seront en train de se dérouler, par des photos pour les Inrockuptibles.
Anne-Claire Norot et Pierre Siankowski
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