Manu Chao joue le 11 septembre à la Fête de l’Huma. Avant son concert, il évoque sa tournée, les débats autour du téléchargement, et son amitié pour le réalisateur et photographe Christian Poveda, récemment assassiné au Salvador.
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Vous êtes en tournée dans toute la France, et le 11 septembre, vous jouez à la Fête de l’Huma ce soir… C’est particulier la Fête de l’Huma ?
J’ai toujours aimé la Fête de l’Huma, c’est une vraie fête populaire, j’y allais quand j’étais ado, j’y ai déjà joué. C’est toujours un plaisir d’aller là-bas, même pour faire le tour des stands à merguez… C’est une fête qui dépasse les clivages politiques, même si c’est la fête du Parti Communiste on le sait.
Les débats sur Hadopi reprennent la semaine prochaine. Que penses- tu de la pénalisation de l’internaute ?
Je me pose des questions. J’ai envie de demander aux concepteurs de la loi ce qu’ils ont prévu pour cette industrie lourde qui, à longueur de journée, matraque les cerveaux des jeunes pour leur faire acheter des machines qui leurs serviront à pirater les artistes ! Aujourd’hui, quand l’industrie de la musique dit que ça ne va pas, c’est d’une hypocrisie totale. Ils ne vendent plus de CD mais ils se sont tous recyclés dans la vente de machines pirates. En ce moment pour eux, c’est le jackpot. Je parle d’Apple, de Sony, de toute la téléphonie.
On peut aussi télécharger légalement…
Quand quelqu’un télécharge ma musique, c’est toujours légal, parce que je suis d’accord ! Je ne vois pas qui pourrait poursuivre un gars qui télécharge un morceau que j’ai écrit alors que je suis consentant ! Je pense qu’il serait très malpoli de ma part de râler quand on télécharge un de mes titres. Ado, 95 % de ma discothèque était piratée.
Tu as été marqué par la disparition de Christian Poveda, le réalisateur de La Vida loca, un documentaire sur les gangs au Salvador, assassiné le 2 septembre. Comment l’avais-tu rencontré ?
Au Mexique, à Guadalajara, j’étais jury dans un festival et il m¹avait laissé présenter son film, que j’avais adoré. On avait passé des journées ensemble, on était vraiment connectés. Le changement de gouvernement au Salvador le rendait très confiant dans l’avenir. Il pensait que beaucoup de choses allaient changer grâce à l’arrivée au pouvoir de Carlos Funes. Il voulait que je vienne jouer dans les prisons là-bas. On était en train de plancher là-dessus. C’était devenu un grand ami.
Comment qualifierais-tu le regard qu’il porte sur les membres de ces gangs ?
Très journalistique. Il te montre des faits sans glorifier la violence. Elle est là parce qu’elle est là. Elle arrive quand elle doit arriver, comme ça lui est arrivé à lui. C’est filmé de l’intérieur, tu es dans la Mara 18. Il y a une confiance absolue entre eux. Christian tentait de montrer les limites de la répression et voulait que l’on comprenne ce qui peut pousser un jeune à entrer dans un gang. C’est vrai de beaucoup de pays du monde : il faut que les jeunes aient un autre espoir que celui-là.
Tu as déjà rencontré des jeunes de gangs ?
Oui. Mais pas au Salvador. Je n’y étais jamais entré. J’allais en avoir l’occasion avec Christian prochainement. J’ai vécu dans une favela, travaillé à Caracas, dans les quartiers. Je connais un peu cette réalité.
Est-ce que tu vas continuer à accompagner le film ?
Pour l¹instant, je n’ai pas de demandes de ce côté-là. Les gens qui ont produit le film sont très proches de moi. Je suis encore dans le choc de sa disparition. C’était un gars motivé, positif. ça m¹a fait énormément de bien de le rencontrer.
Il te donnait envie de faire des choses. Tu avais la sensation qu’il avait peur ?
Non, à aucun moment. Quand il me parlait des prisons, il me montrait des photos, je lui demandais : « Mais tu es sûr que c¹est ok ? » Je n’ai jamais senti en lui le moindre doute. Ou alors il ne le montrait pas. Mais c¹est sûr que quand tu rentres dans ce genre de microcosme, un gang au Salvador, c’est pas tous les jours soleil. Il y avait un risque et il en était parfaitement conscient.
Propos recueillis par Géradine Sarratia et Pierre Siankowski
En tournée : le 15 septembre à Nancy, le 17 à Montbéliard, le 19 à Saint-Etienne, le 21 à Pau, le 23 à Limoges.
La Vida Loca de Christian Poveda, sortie en salle le 30 septembre.
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