Le vent souffle fort sur le chantier du nouveau Palais du Cinéma à Venise, notre envoyé spécial nous livre ses premières impressions sur la 66e édition de la Mostra avec en vrac : Sylvie Testud, Werner Herzog (photo), Johnnie To et Patrice Chéreau.
D’abord Lourdes de Jessica Hausner, qui porte bien son titre et semble plaire au public et aux critiques que je connais. J’ai détesté ça. Sylvie Testud y interprète (elle est parfaite, elle) une handicapée (des pieds à la tête) qui se rend à Lourdes sans grand espoir (d’ailleurs, elle ne croit pas en Dieu). Mais un miracle se produit. L’attitude de ceux qui l’entourent change. Un film de petite maligne, cynique, facile, moralisateur, un peu dégueu, très cruel et misanthrope. J’ai failli sortir un cliché sur l’Autriche, je me retiens (la réalisatrice est de ce beau pays). Le dernier plan est superbe.
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Puis le film « surprise » de ce festival, Mon fils, mon fils, pourquoi as-tu fait cela de Verner Herzog? La surprise, c’est que pour la première fois dans l’histoire de la Mostra, un cinéaste est en compétition avec deux films (puisqu’Herzog a déjà présenté son remake de Bad Lieutenant d’Abel Ferrara avant-hier, que tous semble détester ici, mais je ne l’ai pas vu). Mon fils, mon fils… est un faux polar (une femme est retrouvée morte, son fils semble suspect, un inspecteur, Willem Dafoe, mène l’enquête auprès des amis du fils), et un vrai film déjanté. Il faut dire qu’il a été produit par David Lynch, et qu’on reconnaît sa marque. Pas un chef d’œuvre, mais un film très étrange et souvent drôle.
Vus ce matin, Accident, hong-kongais, réalisé par Soi Cheang, l’un des protégés de Johnnie To, qui le produit par ailleurs. Un bon thriller, dynamique, intelligent, paranoïde, entre Blow out de DePalma et La conversation de Coppola, avec tous les acteurs de To, qui m’a laissé sur une bonne impression. Ai rencontré par hasard, dans un restau, hier soir, Xavier Jamaux, qui en a signé la musique (c’est déjà lui qui avait mis en musique Sparrows de To), et il a bien du talent. On dirait du Hisaishi, en mieux.
Et puis le nouveau film de Patrice Chéreau, Persécution, qui m’a laissé une fois de plus dans le doute le plus profond. Est-ce du lard ou du cochon ? Duris est très bien, Gainsbourg aussi (plutôt), mais… Que cherche Chéreau ? Voilà des années que je pose la question, et je n’ai toujours pas trouvé la réponse. Il y a quelque chose de factice dans son cinéma. Je veux bien admettre qu’on soit contre le naturalisme, qu’on demande à des acteurs de prendre un peu distance et de styliser (j’en discutais récemment avec Jacques Bonnafé, adepte de cette vision). Mais pourquoi, chez Chéreau, ai-je toujours l’impression de voir des acteurs et non des personnages, que les acteurs ne se contentent pas de montrer qu’ils jouent, mais de clamer qu’ils sont acteurs ? Comment croire à un film si… si filmé ?
A demain, si le Lido résiste au vent, qui recommence à souffler sur l’Adriatique.
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