Le vétéran de l’électronique nous propose de quitter notre enveloppe corporelle, d’enfiler notre costume de pixels et de danser en attendant l’apocalypse.
C’est à un drôle de voyage que nous convie Jean-Michel Jarre, 74 ans, vétéran des musiques électroniques, sur Oxymore, son vingt-deuxième album. Un disque multiple, à la confluence de l’hommage et de l’anticipation, du digital et du numérique, de l’expérimental et du fonctionnel. Et, bien sûr, du réel et du virtuel, le producteur étant chargé depuis peu par le CNC (Centre national du cinéma et de l’image animée) de promouvoir le métavers.
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Véritable rond-point musical, Oxymore s’envisage tout d’abord comme un hommage aux pionniers de la musique concrète que furent Pierre Henry et Pierre Schaeffer, et du GRM, le groupe de recherches musicales où Jarre a fait ses premières armes et où la musique moderne s’est inventée. Conçu comme une œuvre immersive enregistrée en binaural et multicanal, Oxymore se veut aussi une véritable carte de visite pour un futur proche, le disque s’accompagnant de sa propre cité virtuelle, Oxyville, où le producteur compte bien organiser de futurs concerts et inviter d’autres artistes.
Plongée dans une techno sourde et dansante
Réalisé et composé dans le studio de création sonore de Radio France, en remerciement au service public et à sa réputation d’ouverture aux expérimentations, avec une batterie de sons que Pierre Henry lui a légués, Oxymore est une plongée dans une techno sourde et dansante, aux rythmes lourds et puissants, peuplée d’échos et de nappes ambiantes.
À l’image de Brutalism, premier single tiré de l’album, conçu comme un clin d’œil au club berlinois mythique, le Berghain. “C’est un titre résolument brut, confirme Jean-Michel Jarre dans le communiqué qui accompagne le disque. J’ai voulu créer une ambiance apocalyptique. Un genre de Big Bang de la techno berlinoise, avec un côté punk comme lorsque ce courant a explosé là-bas, une atmosphère sans doute due aux vestiges de la guerre.”
Entre fin du monde et renaissance
Éclaté en onze titres post-big beat qui dansent dans l’obscurité et ajoutant une pierre supplémentaire à la créativité débordante de son auteur (qui aura sorti rien moins que trois albums ces deux dernières années), Oxymore est, à l’image du clip qui accompagne Brutalism, tout en images de synthèse peuplées d’humanoïdes pixelisés qui se meuvent sous les coups de butoir de l’avatar de Jean-Michel Jarre, MC de la soirée.
Un disque qui, tout en prônant la communion de nos futurs doubles virtuels et la révolution musicale par le métavers, laisse un drôle d’arrière-goût, entre euphorie et angoisse, fin du monde et renaissance, comme la bande son parfaite d’une rave apocalyptique organisée sur les ruines d’un monde en décomposition.
Oxymore (Sony Music). Sorti depuis le 21 octobre.
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