J’adore quand mes ami·es me parlent de ce qu’ils et elles ont vu, lu, visité, aimé dans le mois ou la semaine. J’adore connaître les goûts des autres, ce qui forme un profil esthétique, ce qui les fait désirer, les intéresse.
Cette semaine j’ai visité la brillante exposition Hieroglyphs au British Museum, interviewé Alice Zeniter pour son essai féministe Toute une moitié du monde sur la représentation des femmes en littérature, attendu avec impatience l’émission La Grande Librairie d’Augustin Trapenard consacrée à Annie Ernaux (au moment où j’écris, je ne l’ai pas encore vue).
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Je suis passée en quelques heures de l’invention d’une des écritures les plus anciennes du monde, les hiéroglyphes, à la modernité : l’expérience féminine mise en avant, une vision enfin féminisée de la littérature, une écrivaine recevant le prix Nobel et occupant enfin une place centrale. Les hiéroglyphes ont été inventés vers 3 000 avant J.-C. en Égypte, d’abord pour ordonner, classer, les biens et les produits de consommation dans une société égyptienne en plein essor, bref dans un but économique ; puis dans un but politique, pour raconter (par les grands prêtres) l’histoire politique du pays, c’est-à-dire l’histoire des pharaons, la vie d’hommes de pouvoir et souvent de leurs exploits. Pourtant, vers 1 200 avant J.-C., on trouve non pas une parodie de ce genre, mais une fiction : Le Conte de Sinouhé, une des premières jamais écrites, inspirée du meurtre du roi Amenemhat.
Est-ce que la littérature naît toujours comme un acte d’opposition contre ce qui domine, pour faire violence aux puissants ? Plus de trois mille ans plus tard, en voici peut-être le résultat le plus flagrant : l’avènement des autrices et d’une autre représentation des femmes dans le champ littéraire. À lire d’ailleurs ce dimanche : notre grand entretien avec Alice Zeniter.
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