Si Benoît Hamon enchaîne les lourdes défaites, le web se prend de sympathie pour lui…
« Pauvre chaton Hamon », « On t’aime, Benoît, ne l’oublie pas », « Je veux faire un câlin à Hamon », « Il a besoin de joie et d’amour je crois »… Ah, heureusement que l’internet est là pour consoler Benoît Hamon… Alors que le candidat du Parti socialiste a essuyé une lourde défaite dès le premier tour des législatives, la twittosphère est là pour prendre soin de lui.
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Messages remplis d’amour et de sympathie, émojis en forme de cœurs brisés ou suivis de #RIP… Sur les réseaux sociaux, les internautes lui envoient toute une flopée de messages de compassion. Benoît Hamon, ce « bon gars », comme ils l’appellent, semble susciter de la peine chez les internautes. Hamon a beau avoir échoué, tant à la présidentielle qu’aux législatives, il reste très populaire sur le web.
Pauvre chaton Hamon 💔 https://t.co/PIGpbsoJ3Y
— Conversation 16 (@floasura) June 11, 2017
Le candidat aurait pourtant de quoi être majoritairement critiqué. Son résultat à la présidentielle : 6,35 % des voix. Son résultat aux législatives : éliminé, dès le premier tour. Dur à encaisser pour le représentant du PS, mais les internautes semblent avoir été touchés. « Le pauvre », « Il me fait de la peine », lit-on en masse dans les tweets et les posts Facebook. Sur ce dernier réseau, on organise même un événement pour qu’il encaisse la défaite, le « prendre par la main et l’emmener vers demain ». Et surprise : les soutiens viennent des fans de la première heure, mais aussi des militants de droite. « Sur les réseaux sociaux, il y a une sympathie générique envers Benoît Hamon, il est même bien perçu par les internautes de bords politiques différents », affirme Olivier Rouquan, politologue et chercheur associé au CERSA, qui précise qu’en dehors de l’univers numérique, Benoît Hamon reste « beaucoup moins populaire ».
https://twitter.com/Freezze/status/874219944820568064
Hamon et l’art de l’image du « bon gars »
Pour l’homme politique, le web incarne donc cette dernière sphère où il suscite une majorité d’avis positifs. Comme s’il avait un avatar, le Benoît Hamon 2.0 semble être beaucoup plus apprécié que l’homme politique. Si le brin de sarcasme et d’ironie ne semble jamais loin dans les posts, Hamon éveille au pire seulement un peu de peine.
« Sur internet, Benoît Hamon suscite plus de la compassion et de l’affection. On le voit plus comme un ami ou un voisin qu’il faut consoler… », avoue le politologue.
S’il provoque ce genre de réactions chez les internautes, cela n’a rien d’étonnant. En quelques semaines, Benoît Hamon s’est forgé une image de « bon gars », observe le spécialiste. Ce que les Français retiennent du candidat, aujourd’hui, ce n’est pas l’homme politique et ses mesures sous le gouvernement Hollande, mais c’est l’homme et le citoyen qu’il est. « Les internautes le perçoivent plus comme l’homme, avant le politique. Il suscite encore de la sympathie, donc c’est normal qu’il puisse y avoir cette ‘bienveillance’ autour de lui » , souligne-t-il, les guillemets sous-entendus.
https://twitter.com/ClaraMllt/status/863690850341195776
Cette image du « bon pote », Benoît Hamon l’a travaillée pendant un bon moment. Elle était même « au centre de toute sa stratégie de communication », affirme Thibaut Rioufreyt, chercheur en sciences politique à Sciences-Po Lyon.
« Il a toujours refusé la posture d’un homme providentiel ou d’un leader. Il voulait davantage incarner quelqu’un de très désintéressé, ça a été bénéfique pour lui sur internet », précise-t-il, en ajoutant : « C’est ce qui lui a porté préjudice dans les résultats, on le voyait moins comme un président, mais sur internet ces défauts sont presque vus comme des qualités ».
La spontanéité et l’humour au service de sa com’
Et en effet, sur les réseaux sociaux, le candidat n’a eu de cesse de montrer sa proximité avec les gens. Résultats : il a enchaîné les coups médiatiques qui deviennent viraux, sans jamais compter un seul vrai bad buzz. On se souvient de cette vidéo Snapchat à Élancourt, où des jeunes lui réservent un accueil chaleureux avec des « Hipipip pour Hamon ! » et où il se prête même au jeu de la dédicace. On se souvient de son interview tournée dans un kebab, entre les frites et la viande. Ou du dernier en date, son tweet où il se compare au mythe de Sisyphe, qui symbolise la dureté de la tâche qu’il faut sans cesse recommencer. A chaque fois l’engouement prend, car il mise sur deux choses : l’autodérision et l’humour.
Lundi matin. #Sisyphe pic.twitter.com/OgXccztgpL
— Benoît Hamon (@benoithamon) 12 juin 2017
http://www.dailymotion.com/video/x5mj9gq
« Pendant sa campagne, Benoît Hamon ne surjoue pas, il reste quelqu’un de spontané, honnête et mise sur l’humour. Contrairement à d’autres politiques, il n’est pas dans une démarche de montrer son autorité, et les gens se souviennent de cette sympathie », complète le politologue Olivier Rouquan.
Si Benoît Hamon reste naturel, c’est qu’il est un utilisateur de la première heure. En 2008, il s’inscrit sur Twitter alors que le réseau vient à peine de s’implanter en France. Il est alors l’un des premiers politiques à avoir une vraie audience. « Il est de cette nouvelle génération de quadragénaires qui savent très bien utiliser les réseaux sociaux », analyse Thibaut Rioufreyt. A cette époque déjà, Benoît Hamon n’hésite pas à apostropher directement ses followers, il raconte des anecdotes du quotidien et enchaîne même les blagues avec un ton libre et très humoristique, dont voici un petit florilège :
Hier je déjeune avec une journaliste, un type vient saluer celle ci et m’apostrophe d’un « vous, je ne veux pas vous connaître! ». Suis dead.
— Benoît Hamon (@benoithamon) 11 mai 2010
le soleil est levé sur la Bretagne. il illumine la surface des nuages. les mouettes sont contentes. en dessous c'est gris.
— Benoît Hamon (@benoithamon) August 6, 2008
1ère seconde de l’itw sur @f_inter, je frôle par mégarde le bouton de réglage de la hauteur du siège et m’enfonce. Solitude.
— Benoît Hamon (@benoithamon) 15 juillet 2011
Quand on pense qu’à une semaine près, Nicolas Sarkozy libérait l’Europe de l’Est. C’est ballot quand même.
— Benoît Hamon (@benoithamon) 9 novembre 2009
Une image suffisante pour revenir en politique ?
Au regard de sa forte popularité sur les réseaux sociaux, le site ReputationLab, qui mesure les phénomènes d’influence sur Internet, l’annonçait déjà comme le grand vainqueur des primaires de la gauche en janvier dernier. Il était le candidat qui déclenchait le meilleur engagement sur Facebook et Twitter. Et il déclenche toujours cet emballement :
« Les jeunes sont surreprésentés dans ses meetings, il est aussi beaucoup soutenu par des collectifs et des personnes plus précaires. Son cœur d’électorat est donc surtout composé de ceux qui utilisent le plus les réseaux sociaux », précise le chercheur Thibaut Rioufreyt.
Ce ne sont pas ses nombreux échecs qui semblent l’arrêter. Entre la photo de Sisyphe ou son passage au Gros Journal, où il blague sur la possibilité de se réorienter en « chauffeur Uber », Benoît Hamon continue de surfer sur cette image. Il prépare déjà son grand retour politique, annoncé pour le 1er juillet avec la présentation de son nouveau mouvement. Jouer encore de cette image, l’homme n’aurait plus que ça : « Pour revenir en politique il ne lui reste que son image auprès des internautes car il n’a pas les autres outils », précise Thibaut Rioufreyt.
Suffisant pour réussir son come-back ? Pas si sûr : « Avec cette image il n’a pas de crédibilité pour revenir en politique, pour l’instant ce n’est pas suffisant », affirme Olivier Rouquan, avant d’ajouter : « Par contre, il y a une sympathie générique autour de lui… c’est mieux que rien ».
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