Dans l’esprit des jeux From Software, mais en plus accueillant, le nouveau jeu du studio Spiders à la mémorable héroïne automate est une belle réussite.
À chaque sortie d’une nouvelle production From Software, de Dark Souls à Elden Ring en passant par Sekiro, le même débat ressurgit : amples et majestueux, mais d’une difficulté qui confine au belliqueux, ces jeux ne gagneraient-ils pas à posséder un mode “facile”, pour celles et ceux qui aimeraient les pratiquer sans se heurter régulièrement à un mur ?
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Influencé par l’approche sévère (mais juste) du jeu vidéo de Hidetaka Miyazaki, Steelrising règle le problème avec une aisance presque déconcertante. Souffrir n’est pas votre truc ? Un petit tour dans les menus pour activer le mode “assistance” et vous voilà en mesure de réduire les dégâts causés par les attaques des ennemis ou d’augmenter la vitesse à laquelle votre personnage retrouve son énergie. Certaines récompenses réservées aux puristes du mode standard ne pourront alors plus être obtenues, mais qu’importe ! La valeur clé, ici, est le consentement – le jeu ne nous fera de mal que si on le veut bien.
Apprendre de ses erreurs
C’est une excellente nouvelle car si, comme chez From Software, une part importante de l’expérience consiste à apprendre de ses erreurs pour maîtriser peu à peu le système de combat et triompher d’adversaires qui paraissaient d’abord invincibles, Steelrising ne repose pas entièrement sur cette logique quasi-sportive de progression et d’entraînement, et peut aussi gagner à se pratiquer d’une manière plus fluide et décontractée.
D’autant que, même si c’est souvent de manière allusive et elliptique, le jeu du studio Spiders dirigé par Jehanne Rousseau a des choses à nous raconter.
Disneyland lettré
Nous sommes en 1789, en pleine Révolution française. Nous sommes Aegis, une automate qui va affronter l’armée d’androïdes utilisée par Louis XVI pour réprimer la révolte. Du château de Saint-Cloud à Paris, du palais du Luxembourg au jardin des Tuileries, on ne croisera que peu d’êtres vivants, la rue semblant appartenir aux machines. Et si, ici ou là, Lafayette, Robespierre ou Mirabeau se présentent à nous, c’est dans un étrange sentiment d’irréalité, comme pour un mini-spectacle à thème après le défilé de pantins bagarreurs.
Au fond, Steelrising prend acte du fait que tout jeu de reconstitution historique sera toujours, au moins en partie, un parc d’attractions mécaniques, un Disneyland lettré, et que le mieux est sans doute de l’assumer et d’en jouer. En découle une aventure fantasmatique et entêtante qui s’affiche toutes coutures, ou soudures, apparentes. Au point d’apparaître autant comme une riposte à Assassin’s Creed, qui refit lui aussi la Révolution française dans l’épisode Unity, que comme un Dark Souls à la française.
Danseuse
Et puis Aegis est un merveilleux personnage non-humain, lancé dans une bataille qui n’est pas la sienne. Aegis, qui fut une danseuse avant de devenir guerrière et qui, dans ce monde sombre et brutal, amène une élégance étrangement touchante qui doit autant à ses mouvements quasi-décomposés qu’à son masque presque sans expression – tout est dans le “presque”. Une automate solitaire et gracieuse qui lutte pour le peuple : que pourrait-on espérer de mieux comme alter ego de jeu vidéo ?
Steelrising (Spiders/Nacon), sur PS5, Xbox Series X/S et Windows, de 50 à 60€
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