Avec “One Song”, l’artiste belge Miet Warlop réinvente l’une de ses pièces de jeunesse, un requiem pour son frère, où l’expérience du deuil passe par le sport. Entretien.
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Au départ, il y a le théâtre NTGent de Gand (Belgique) qui vous fait la proposition d’imaginer une pièce synthétisant votre travail, une série intitulée Histoire(s) du théâtre. Comment l’avez-vous accueillie ?
Miet Warlop – Comme un honneur ! Je passais après Milo Rau, Faustin Linyekula et Angélica Liddell qui avaient, chacun à sa manière, relevé le défi ; c’était une proposition qui ne se refuse pas, comme on dit ! C’était surtout l’opportunité de revenir à l’origine de mon travail, ce que l’on a rarement l’occasion de faire, puisque l’on réfléchit toujours à la pièce suivante. Alors voilà, je me suis replongée dans mon premier spectacle, Sportband/Afgetrainde Klanken, créé en 2005. Celui-ci était un requiem pour mon frère dans lequel j’associais le sport et la musique pour raconter mon expérience du deuil. On peut la considérer comme une œuvre de jeunesse. Tout juste diplômée, je la portais avec une énergie incroyable, mais je ne savais pas du tout où j’allais. Aujourd’hui, nous sommes en 2022. J’ai changé, évidemment. La vie a changé. Mon rapport au deuil a changé. One Song, je crois, est une version plus radicale, mais aussi plus universelle de Sportband/Afgetrainde Klanken. Le temps a fait son travail.
Comment expliquez-vous ce titre, qui diffère complètement de la première version ?
Nous avons écrit un bout de chanson que nous répétons à l’infini comme un mantra. Son effet, je trouve, provoque l’unité des êtres, l’unité de l’expérience, l’unité du collectif. Avec sa musique, la pièce invoque un long mouvement circulaire, qui peut exorciser la douleur… Et, ce faisant, crée du lien. J’aime l’idée que ma pratique artistique est cyclique, qu’elle est un processus jamais achevé.
Pourquoi avez-vous choisi le sport pour surmonter – ou accepter – le deuil ?
Parce que, au départ, j’étais décontenancée par le sport. Je ne comprenais pas du tout les gens qui courent pour courir, ou les cyclistes qui font du vélo pour faire du vélo. Mais à travers l’effort, il faut bien avouer qu’il se passe quelque chose. Dans l’épuisement, il arrive quelque chose d’universel et de transcendantal. L’idée n’est pas de faire l’apologie de la technique, mais plutôt d’une force que nous mettons en commun.
One Song, conception et scénographie Miet Warlop, les 20 et 21 septembre, La Criée – Théâtre national de Marseill
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