Le retrait des Etats-Unis de l’accord de Paris annoncé par Donald Trump ne fait pas l’unanimité dans le pays. Nombre d’entreprises, d’Etats et de villes se regroupent pour faire émerger une alternative pro-environnement.
« J’ai été élu pour représenter les habitants de Pittsburgh, pas de Paris », justifiait Donald Trump en annonçant son retrait de l’accord de Paris. Le jour même de cette déclaration, le maire démocrate de la ville de Pennsylvanie, Bill Peduto, rectifiait : “Je peux vous assurer que nous suivrons les directives de l’accord de Paris pour notre peuple, notre économie et notre avenir.” Une défiance qui est loin d’être isolée. Les entreprises, les collectivités et les citoyens qui élèvent la voix aux États-Unis se multiplient.
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As the Mayor of Pittsburgh, I can assure you that we will follow the guidelines of the Paris Agreement for our people, our economy & future. https://t.co/3znXGTcd8C
— bill peduto (@billpeduto) 1 juin 2017
Le milliardaire et ancien maire de New York, Michael Bloomberg, s’est fait le champion de cette résistance devant les Nations unies. Le lundi 5 juin, il rendait public une lettre déjà signée par plus de 1 200 institutions. Leur message : “Nous sommes toujours dedans.” Dans un communiqué publié le mardi 6 juin, le collectif derrière cette déclaration gonfle les muscles : “Les signataires incluent des leaders de 125 villes, 9 Etats, 902 entreprises et investisseurs, et 183 collèges et universités. Les villes et les états signataires représentent 120 millions d’Américains et une contribution de 6 200 milliards de dollars à l’économie américaine.”
Un sujet clivant dans l’électorat de Donald Trump
Des entreprises multinationales, des universités prestigieuses et des Etats qui ont presque tous voté pour le Parti démocrate à l’élection présidentielle de 2016… Les signataires ressemblent peu à l’Amérique déclassée qui a fait élire Donald Trump. Pour autant, l’accord de Paris est un sujet assez clivant dans son électorat. Selon une étude de l’université de Yale, 47 % de ses électeurs soutiennent le maintien des États-Unis dans le traité.
Vincent Michelot, professeur d’histoire politique des États-Unis, estime que la décision pourrait sécuriser la base électorale de Donald Trump, candidat des travailleurs américains contre la mondialisation :
“Donald Trump est le président le plus impopulaire des États-Unis à ce stade du mandat. En termes de promesses réalisées il n’a pas grand-chose à offrir à ses électeurs et il n’y a pas eu de grandes lois votées. Là c’est un signal très fort envoyé à son socle électoral qui bien que relativement restreint est très solide. Ça ne fait que conforter son image auprès de ses électeurs mais on lui sera aussi reconnaissant dans le Parti républicain, où il y a un fort scepticisme sur le changement climatique.”
Une stratégie pour le moment gagnante donc, mais qui pourrait être plus dangereuse à long terme si le président américain ne tient pas les promesses annoncées. “Il a promis le retour de l’emploi mais on ne voit pas trop jusqu’où ça peut aller, expose Nicole Bacharan, co-auteure du livre First ladies (Éditions Perrin). Le secteur du charbon représente 50 000 postes, ce qui est assez réduit à l’échelle du pays. Et si les emplois dans l’industrie ne sont pas au rendez-vous il va perdre des points.”
http://www.youtube.com/watch?v=Pj5T0bN25rU
Un recul sur le terrain
Si le camp pro-climat peut faire reculer Donald Trump dans l’immédiat, ce sera donc sur le terrain, au niveau local, en contrebalançant sa politique environnementale et les coupes de subventions aux énergies renouvelables. Avec des Etats aussi importants que la Californie ou New York, les soutiens de l’accord de Paris sont loin d’être anodins explique Nicole Bacharan :
“La Californie est la sixième puissance économique mondiale et eux ne plaisantent pas sur ce sujet parce qu’ils le vivent au quotidien avec les glissements de terrain et les inondations. Ils peuvent continuer au niveau de l’Etat à imposer les normes de Barack Obama sur les énergies propres. Et surtout, le marché californien est énorme dans le secteur automobile. Ça va influencer les constructeurs, d’autant plus qu’à l’étranger aussi les normes deviennent plus strictes.”
L’organisation de ces collectivités parachève l’abandon de tout leadership des États-Unis par Donald Trump, isolé diplomatiquement pour sa position sur le climat. Une mise à l’écart déjà entretenue par le gouvernement français. Vendredi, le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, expliquait que la France proposerait “des initiatives à destination des forces vives qui souhaitent mettre en œuvre les engagements de l’accord de Paris”. De la même façon, le ministre de la Transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot, souhaite rencontrer les acteurs américains qui “essayent de changer la donne de l’intérieur” révèle Le Parisien.
More than 1,000 cities, states, businesses & universities commit to delivering on the Paris Agreement. https://t.co/8hr1CXaPPj #WeAreStillIn pic.twitter.com/nKzrs2zoDX
— Mike Bloomberg (@MikeBloomberg) 5 juin 2017
Cet isolationnisme ne sera pas sans effets d’un point de vue électoral. “C’est une telle perte de statut et de crédibilité dans le monde pour les États-Unis que les conséquences ne peuvent être que négatives. Ça va nuire à Donald Trump dans les élections et les initiatives de politique étrangère qu’il pourrait prendre”, juge Nicole Bacharan, qui met en valeur l’importance de l’écologie pour les jeunes et les chrétiens américains.
Et le phénomène dépasse le sujet environnemental comme l’explique Vincent Michelot : “Quelque chose d’énorme se passe. À la fois dans le domaine de l’environnement et du terrorisme, les États-Unis se retirent sur leur pré carré et abandonnent toute forme de leadership. Donc les autres pays prennent la place et attendent que la présidence se termine.” Un sentiment partagé par l’opposition, qui souhaiterait hâter la fin.
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