La chorégraphe et danseuse allemande Pina Bausch est morte ce matin à l’âge de 68 ans. Elle restera comme l’une des figures majeures de la danse contemporaine.
Née en 1940 à Solingen dans la Rhur (Allemagne) , Pina Bausch sera d’abord élève de l’Ecole d’Essen dirigée par Kurt Joos, un des maîtres du courant expressionniste. Partie à New York pour étudier à la Julliard School, elle se revéle sur place une exceptionnelle interprète qui aurait pu faire carrière dans une des grandes compagnies américaines. Mais c’est aussi une forte tête qui sait ce qu’elle veut : en l’occurence revenir à Essen, chez « elle ».
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A la toute fin des années 60, elle signe ses premières chorégraphies avant de se voir proposer la direction du Ballet de Wuppertal en 1973, une compagnie classique qui vivote dans cette maison lyrique. Après une série d’opéra-dansés, la chorégraphe se heurte plus frontalement au public d’abonnés du lieu avec des créations fortes comme Le Sacre du printemps -dansé sur de la terre fraîche!- ou Barbe-bleue.
Peu à peu elle impose son style, un théâtre-dansé où elle donne la parole à ses danseurs venus du monde entier (avec pas mal de français comme Dominique Mercy puis Jean-François Duroure). Les scènes sont composés comme une partition : une action jouée autant que dansée parfois reprise en cours de specatcle.
De longues répétitions, un système de question réponse, Pina Bausch pense bien en amont son art : « Ce n’est pas de l’improvisation. Je pratique très peu cette forme libre. Mon travail est une recherche et quand vous recherchez vous n’improvisez pas« .
Surtout elle s’entoure d’une équipe qui donne forme à ses rêves -ou parfois des cauchemars éveillés : ainsi Rolf Borzik puis Peter Pabst signeront des scénographies magnifiques en étroite collaboration avec Pina Bausch : Une salle de bal dans Kontakthof, Un champ d’œillets pour Nelken. A cheminer dans le parcours de Pina Bausch on se rend compte que la chorégraphe n’a jamais cesser d’entrevoir son répertoire comme une forme vivante et non comme un musée de sa danse.
Et ce depuis ses débuts de chorégraphe en charge du Ballet de Wuppertal qui deviendra par la suite le Tanztheater Wuppertal. Les chefs d’œuvre sont ainsi régulièrement « entretenus » c’est à dire repris, voir remonté, avec des distributions changeantes, et cohabitent sans mal avec les « neue Stück » (nouvelles pièces) dévoilées presque tous les printemps à Wuppertal même. Puis souvent à Paris, au Théâtre de la Ville, où la chorégraphe sera invitée régulièrement ces trente dernières années.
Beaucoup d’observateurs avaient dernièrement reproché à Pina Bausch des pièces plus tièdes souvent créées après des résidences de deux mois à l’étranger (Inde, Turquie, Corée). Il y avait moins de violence en scène, celle des couples entre amour et trahison, une nouvelle génération de danseurs aussi. Mais on était encore sous le charme de ces pièces avec des filles en robe longue, des garçons en costume aux bandes-sons distinguées.
Pina Bausch avait eu l’heureuse idée en 2000 de remonter Kontakthof, une réussite, avec des « seniors » de plus de 65 ans non professionnels. Et en 2008, supervisa une autre version du même ballet avec des ados de 14 ans et plus.
On se souvient de cette matinée dans « son » théâtre à Wuppertal où elle s’était réconcilié avec son public qui lui faisait à chaque fois un triomphe : venant saluée, littéralement portée par ces jeunes interprètes, Pina Bausch ne nous avait jamais paru si heureuse. Elle meurt à 68 ans des suites d’un cancer fulgurant. Elle entre aujourd’hui dans l’éternité de la danse.
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