Invitée des Rencontres chorégraphiques de Seine-Saint-Denis, la Néerlandaise Ann Van den Broek ose avec Accusations un opéra des corps à forte intensité.
A une époque où les programmations danse sont de plus en plus frileuses, les Rencontres chorégraphiques internationales de Seine-Saint-Denis font encore et toujours acte de résistance. Jouant l’option tête chercheuse, cette manifestation a ainsi révélé ces dernières années Daniel Linehan (Not about Everything), Jan Martens (Sweat Baby Sweat) ou Alessandro Sciarroni (Folk-s). En invitant pour la seconde fois Ann Van den Broek, les Rencontres persistent et signent dans le sillage d’une vague néerlandaise.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
La chorégraphe multiplie les projets – et les distinctions. A Delft ce soir-là, la salle du Theater de Veste est aux trois quarts vide – l’engouement critique a visiblement précédé celui du public. Pourtant l’engagement des interprètes ne fera pas une seule fois défaut. Ann Van den Broek a pris pour point de départ un texte, magnifique, de Peter Handke, intitulé Introspection. Les mots sont fusionnés dans un maelström de sons et d’images qui ne cesse quatre-vingts minutes durant.
Une chorégraphie aux angles d’attaque multiples
Accusations et regrets forment ici une litanie à laquelle répond le défilé – parfois comme une parade quasi militaire – des interprètes. Handke jouait sur la répétition, Van den Broek va plus loin, osant le rewind comme la danse au sol, les sorties par les rangs de la salle ou le concert de poche –le musicien Gregory Frateur ne quitte pas son synthé. En utilisant les projections vidéo live, la chorégraphe démultiplie les angles d’attaque. Et plonge les spectateurs dans un opéra des corps à haute intensité.
Cette boucle humaine joue sur la corde raide dans l’espace réduit d’une avant-scène bordurée de lumières. Accusations peut devenir addictif. Il lui manque néanmoins une dramaturgie plus affirmée qui ferait tenir ensemble Handke et la gestuelle. A trop vouloir envisager la scène comme un tout, le risque est grand de nous semer en route. On reste néanmoins frappé par la puissance visuelle qui se dégage par instants de cette création. Sa perfection formelle en est à la fois le point fort et la limite. Philippe Noisette
Accusations conception Ann Van den Broek, les 10 et 11 juin à La Commune, Aubervilliers
{"type":"Banniere-Basse"}