Rose fluo et sourire figé sont au menu cet été.
Plébiscité par les chantres de la télé-réalité Kim et Khloé Kardashian, la chanteuse Lizzo ou encore la comédienne Megan Fox, le style “Barbiecore” repeint les réseaux sociaux d’un rose criard. Même topo chez les créateur·trices de mode, puisque la collection Automne/Hiver de Valentino était intégralement teintée de fuchsia. Les chiffres en attestent : la société de paiements en ligne Klarna recense une augmentation des achats de mini robes roses de 970 % ces six derniers mois. Les recherches Pinterest mentionnant les vêtements de Barbie ont elles aussi augmenté de 75 % récemment. De quoi s’agit-il ? Si l’on en croit les vidéos TikTok, l’uniforme “Barbiecore” se compose d’une mini robe moulante ou d’un bustier, de talons vertigineux et d’un sac à main microscopique avec nail art et ombre à paupières de circonstance. Le tout en rose bonbon de rigueur.
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Pourquoi diantre ? La faute à des photos qui nous parviennent régulièrement du tournage du film Barbie, dont la sortie est prévue à l’été 2023. Margot Robbie (Barbie) et Ryan Goslin (Ken) y sont attifé·es comme il se doit : cycliste en lycra fluo, avec visière assortie. Propulsé aux sommets de la hype ironique, le projet est dûment pimpé par le vernis auteuriste de son couple de créateur·trices, Greta Gerwig et Noah Baumbach (Frances Ha, Marriage Story). De plus, la mode n’en finit pas de ressusciter les années 1990, charriant dans son sillage crop-tops, nombrils à l’air, et un vent d’insouciance et de prospérité à rebours des préoccupations climatiques actuelles. Barbie non plus ne connaît pas la crise : souvenez-vous, celle-ci était commercialisée avec tout un attirail clinquant allant de la voiture décapotable à la piscine (on l’imagine sans peine, version nantie de 2022, en jet privé).
“Barbiecore”, est-ce moche, bête et antiféministe ?
“Poupée gaulée”, “blondasse écervelée”? Le “Barbicore” évoque volontiers un style régressif et racoleur. Pourtant, la figure honnie de la bimbo, longtemps stigmatisée, connaît ces jours-ci un retour en grâce : en France, un essai rend ainsi hommage à Loana Petrucciani, gloire fanée de Loft Story.
Rappelons également que la Barbie est un pur produit de la fin des années 1950. La poule aux œufs d’or de l’entreprise d’Harold Matsen et Elliott Handler (les “Matt” et “El” de Mattel) est en réalité la copie d’une poupée allemande, Bild Lilli. Pulpeux et peroxydé, ce personnage de bande dessinée, paru dans le quotidien Bild, est une femme adulte, mannequin, bref, une pin-up très éloignée des poupons commercialisés à l’époque pour les enfants. Barbie sera ensuite baptisée d’après la fille du fondateur de Mattel, Barbara. Kenneth, le fiston, donnera son nom à Ken, en 1961.
Malgré la diffusion de modèles plus inclusifs, des déclinaisons de produits sous forme de série et, désormais, de film, la firme Mattel peine à enrayer la baisse de ses ventes. Karma providentiel que cette publicité gratuite : elle se frotte aujourd’hui les mains et profite gratuitement de l’aubaine.
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