Triomphe d’ »Amour », sieste de Kevin Costner, rien pour Carax et Lvovsky. Jean-Marc Lalanne revient pour vous sur la cérémonie des César 2013. Et il n’est pas hyper content.
Des inserts insistants sur Kevin Costner pris en flag de sieste éclair pendant qu’Emmanuelle Riva remercie les votants ; Jamel Debbouze qui s’asseoit par terre et regarde sa montre pendant que la productrice d’Amour reçoit le César du meilleur film ; Antoine de Caunes qui tance sèchement Cyril Menegun, coupable de faire trainer son laïus de lauréat du premier film pour Louise Wimmer, puis fait de la trottinette pour faire diversion pendant le speech de l’équipe son de Cloclo ; des vannes lourdes et pourries sur la langue et la plume de la ministre de la Culture : autant de pics de sale ambiance et de goujaterie dans une soirée des César désagréable et tendue comme jamais.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Un Antoine de Caunes démotivé
Rarement on aura eu à ce point le sentiment que la puissance invitante (la télévision, Canal +) avait au fond un peu honte de ses invités (la profession du cinéma, son armée de l’ombre, ses techniciens qui, non contents d’être inconnus du public, se lancent dans des revendications corporatistes qui cassent l’ambiance) et semblait persuadée que la cérémonie était si essentiellement chiante qu’il n’y avait d’autre choix que de la désigner à chaque instant dans l’espoir incertain d’en rire.
A ce fastidieux exercice d’auto-dérision confinant à l’auto-dénigrement, Antoine de Caunes n’a jamais paru aussi démotivé et certaines de ces vannes s’échouaient dans un vide sidéral, une grande trainée de silence et de gêne. Laurent Lafitte, s’emmêlant sciemment et avec virtuosité dans sa métaphore à base de colonne vertébrale et de moelle épinière, Audrey Lamy vociférant du Céline Dion en louant les boiseries et les revêtement muraux des décorateurs,ont malgré tout fait le job et détendu sporadiquement l’atmosphère.
Il faut dire que pour ne rien arranger, l’équipe gagnante de la soirée brillait par son absence. Puisque ni Trintignant, ni Haneke,ni Huppert n’occupaient leur fauteuil, Emmanuelle Riva était la seule représentante du pool Amour, ce qui rendait la fête un peu triste et incomplète. Derrière Amour (cinq César), De rouille et d’os n’a pas réédité le double exploit de De battre mon cœur s’est arrêté puis Un Prophète (meilleurs films en leur temps), mais a quand même décroché la médaille d’argent avec quatre récompenses (espoir masculin pour le beau Matthias, adaptation, musique, montage).
Derrière, Les Adieux à la reine repartait avec trois César, Le prénom (outsider popu de service) en gagnait deux, Cloclo un, et Les Invisibles de Sébastien Lifshtz était distingué comme Meilleur documentaire. Au rayon de la lose en revanche, et bien que nommés dans de multiples catégories, Dans la maison, Camille redouble et Holy Motors ont fait chou blanc. C’est assez incompréhensible pour Noémie Lvovsky, qui méritait vraiment de voir récompensée une des nombreuses cordes à son arc (actrice, auteur, cinéaste…).
Quant à l’absence au tableau d’honneur du plus beau film français de l’année, celui de Léos Carax, elle ne constitue pas à proprement parler une surprise. Comme le film n’appelle guère à la demi-mesure, autant qu’il n’ait rien eu car il méritait tout, ou presque.
{"type":"Banniere-Basse"}