Le nouveau film de Ron Howard, mis en ligne sur Prime Video, retrace l’opération de secours de la grotte de Tham Luang en juin 2018, qui a vu le sauvetage inespéré de 13 jeunes Thaïlandais pris au piège d’une grotte inondée. Une reconstitution appliquée, mais pas vraiment novatrice.
En juin 2018, douze jeunes membres d’une équipe de foot amateur, âgés de 11 à 16 ans, ainsi que leur entraîneur, se retrouvent bloqués dans une grotte du massif de Doi Nang Non, en Thaïlande. Alors qu’ils exploraient l’une des cavernes après un entraînement, une mousson précoce inonde les boyaux dédaléens de la grotte et les prend au piège. Les voilà retranchés dans une cavité incertaine, cernée par des kilomètres de roches submergées sous les flots continus de pluies diluviennes, sans contact avec l’extérieur, et avec une chance de survie proche du néant.
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La planète entière, qui vibre alors au rythme de la coupe du monde de football en Russie, retient soudainement son souffle. Une opération de sauvetage hors norme, fruit d’une collaboration internationale engageant près de 20 pays, l’armée thaïlandaise et des milliers de volontaires, est mise en place dans l’espoir infime de tirer les jeunes Thaïlandais d’affaire. C’est alors qu’entre en scène un groupe de plongeurs britanniques, certes amateurs, mais spécialistes de la plongée souterraine. Ces têtes brûlées, plongeurs chevronnés et héros dans l’âme, échafaudent un plan de sauvetage défiant l’entendement et enfilent leurs bouteilles d’oxygène avant de s’enfoncer dans les ténèbres. Après 18 jours d’un suspense suffocant, et au gré d’une opération de rescousse en tout point ahurissante, ils parviennent à évacuer les 13 jeunes pris au piège. Treize vies qu’on croyait condamnées, treize vies sauvées. Un miracle.
Comme une impression de déjà-vu
L’opération de secours de la grotte de Tham Luang, qui a tenu le monde en haleine en juin 2018, recèle tous les ingrédients du film de sauvetage dans les règles de l’art, à faire frémir n’importe quelle boardroom hollywoodienne : une histoire vraie, une situation désespérée, un groupe de sauveteurs héroïques, une fin miraculeuse. Sortez le chéquier. Sauf que voilà, ce film existait déjà…
Documentaire haletant diffusé sur Disney+ fin 2021, The Rescue retrace scrupuleusement toutes les étapes de cet invraisemblable sauvetage, du 1er au 18e jour, à travers un grand nombre d’images d’archives et quelques séquences reconstituées, parfaitement intégrées et quasiment indécelables. Hasard de calendrier ou manque de jugeote ? Qu’importe, Ron Howard a dû faire grise mine à la vision de ce documentaire solidement ouvragé et riche en émotions, sorti moins d’un an avant son film, lui coupant quelque peu l’herbe sous les pieds.
D’autant que le réalisateur d’Apollo 13, qu’on a connu chroniqueur un brin ronflant de la part de folie qui conditionne l’héroïsme, avait pour une fois refréné ses pulsions d’hagiographe exalté pour se river à une reconstitution millimétrée du sauvetage, apparentant sa démarche à celle… d’un documentariste. Douce ironie.
Un film un peu trop artificiel
Porté par Viggo Mortensen et Colin Farrell, vraisemblables en plongeurs téméraires, au flegme britannique et à l’héroïsme rentré, et Joel Edgerton en anesthésiste risque-tout, Treize vies n’est pas un film raté, et comporte même quelques séquences de spéléologie sous-marine ébouriffantes, qui rendent bien compte de la déraison de l’opération, et du prodige de son succès. Mieux, la relative sobriété du film (pas de musiques pompières ni de discours ampoulés, un déroulé factuel des événements) lui permet d’éviter l’écueil d’un surlignage émotionnel qui guette ordinairement pareilles entreprises. Hélas, sa proximité (autant calendaire qu’esthétique) avec The Rescue rend le film sinon vain, du moins caduc, et sa démarche quasi-documentaire met paradoxalement en lumière son artificialité.
Pour quiconque aurait vu le documentaire, le visionnage de Treize Vies consistera donc en un vaste jeu des 7 erreurs, somme toute amusant, mais forcément redondant. Pour les autres, le film de Ron Howard, appliqué à défaut d’être génial, sera un bon moyen de revivre cette opération de rescousse défiant l’entendement, qu’on aurait certainement jugé invraisemblable si elle n’avait pas été vraie.
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