Avec “Gemini Rights”, le surdoué de Compton renouvelle les noces du funk et de la soul dans des morceaux vulnérables, tubesques et engagés dans une relation libre avec la pop et la bossa-nova. Une immense réussite.
À 24 ans, Steve Lacy n’a plus rien de ces musiciens discrets, nerds, mal dans leur peau. Si Apollo XXI, en 2019, s’entendait comme l’annonce subtile d’une première maturité, concomitante à diverses expériences auprès d’artistes de renom (Kendrick Lamar, Solange, Vampire Weekend), Gemini Rights s’entend comme l’apothéose d’un style, fait de funk, de soul, d’arrangements somptueusement raffinés et d’allers-retours entre le passé et le présent.
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Il y a du Stevie Wonder et du Prince dans cette manière de faire claquer les mélodies, de penser chaque titre comme un potentiel hit. Il y a du Frank Ocean dans la manie de tout contrôler, d’affirmer une autre sensualité, une autre sexualité également, mais aussi d’être attentif aux moindres détails. Il y a surtout beaucoup de Steve Lacy dans cet album de rupture, débordant de fragilité et étonnement en phase avec la démarche actuelle de Syd, sa partenaire de jeu au sein de The Internet, dont le dernier LP se nomme Broken Hearts Club.
Tout est permis
De la guitare bondissante d’Helmet à Mercury et son groove hérité de la bossa-nova, ces dix nouveaux morceaux, étalés sur trente-cinq minutes, rappellent que toutes les pensées sont ici permises, les tabous remisés : œuvrant désormais en studio, le Californien y parle essentiellement de son ex, sans rien masquer de ses désirs enfouis, de sa bisexualité, de ses regrets, de ses peurs et même, dans un élan impudique et graveleux, de ce corps faisant ressurgir dans son esprit diverses pensées libidineuses.
Sur Cody Freestyle, l’un des titres les plus saisissants de Gemini Rights, avec ses synthés planants, Steve Lacy se fait même acerbe : “We don’t gotta be together forever/Cos I could do better.” Un ton fier, assumé, qui évite à ce second album de couler dans une mélancolie pesante et rend à l’érotisme sa part de divinité.
Gemini Rights (L-M Records/RCA/Sony Records). Sortie le 15 juillet.
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