Second disque des jeunes britons d’Art Brut : pompier mais diablement agissant.
On sait trop bien les lacunes que peuvent dissimuler les groupes aux nombreuses anecdotes : d’Art Brut, on a souvent évoqué la fascination pour le peintre Jean Dubuffet ou encore le soutien accordé à l’émission Top of The Pops avant que cette dernière ne disparaisse des écrans anglais. On a beaucoup parlé des premières parties des Libertines, de l’influence évidente de Franz Ferdinand. Bref, Art Brut aurait aisément pu n’être qu’une petite formation anglaise parfaite pour les discours et le name-dropping, mais peu convaincante une fois les chansons sorties de leur contexte. Tout cela était sans compter sur la personnalité d’Eddie Argos, leader cocasse au cynisme proche de celui d’un jeune Jarvis Cocker, grand fan de Jonathan Richman, compteur d’histoires aussi variées que « Les gens amoureux deviennent gros » ou « Je voudrais être le garçon qui écrira la chanson qui fera qu’Israël et la Palestine se réconcilient« .
Pour son deuxième album, ce dernier n’a pas hésité à avoir recours aux services du producteur Dan Swift, passé maître dans l’art de transformer les essais (on lui doit notamment la réalisation du Final Straw de Snow Patrol). Résultat : It’s a Bit Complicated pourrait bien, outre-Manche, constituer le chaînon manquant entre le hip-hop décontracté de Mike Skinner et le punk étriqué des Rakes – il pourra par ailleurs être psalmodié par tous les habitants du pays le vendredi soir à la sortie du pub : Argos crie beaucoup plus qu’il ne chante. Ceux qui poursuivent les mélodies et le raffinement devront donc passer leur chemin : c’est la poigne et le dynamisme d’Art Brut (qui porte son nom mieux que jamais) qu’on découvre aujourd’hui dans ce détonnant It’s a Bit Complicated. Une tendance que les concerts du groupe, formidables, avaient déjà laissé entrevoir.