Les guitares froides et aiguisées des anglais reviennent avec un romantisme dramatique.
Non contente de marquer les trente ans de la disparition d’Elvis, les quarante ans de l’avortement du Smile des Beach Boys ou les dix ans de la mort de Jeff Buckley, 2007 pourrait aussi être l’année de la célébration de Joy Division. Cet automne, un film (Control d’Anton Corbijn) et un acteur (Sam Riley) se chargeront de réveiller sur grand écran le spectre de Ian Curtis, un fantôme que n’ont cessé de convoquer dans nos oreilles et depuis quelques années les formations rock. C’est une même mission que semblent s’être donnée les Anglais d’Editors qui ont décidé de foutre les jetons à la France qui se lève tôt : en profitant du retour du rock pour lui injecter une bonne dose de guitares patibulaires et de chœurs foncés, symptomatiques de la toute fin des années 70.
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Car la musique du groupe n’a rien de bon enfant, elle va toujours très vite, elle ignore les accords majeurs et aime les textes alarmants – en témoigne le titre du morceau d’ouverture du second album d’Editors, Smokers outside the Hospital Doors. Une urgence qui a déteint sur leur démarche : ils n’ont pas attendu longtemps avant de donner suite à leur dernier album, malgré une longue tournée fatigante. Le premier album d’Editors et de nombreux concerts (dont quelques furibondes premières parties de Franz Ferdinand) les avaient rapidement posés comme nouveaux espoirs du rock britannique. Et la troupe de Tom Smith a préféré enchaîner dans la foulée, de peur peut-être de disparaître aussi vite qu’elle était arrivée.
Avec leur second album, les Anglais transforment l’essai qu’ils avaient laissé entrevoir sur le sympathique mais un peu élémentaire The Back Room. Et confirment : la musique d’Editors n’a pas l’âge de ses membres. Elle semble raconter des histoires d’hommes revenus de tout, ayant bien connu le diable. Même romantisme dramatique que chez Joy Division ou The Chameleons, même mélodies flirtant avec la pluie – nul besoin d’être bilingue pour deviner le spleen qui a dû teinter les adolescences de ces Anglais, et qui transparaît dans chacun de leurs refrains. Une mélancolie tout droit héritée du post-punk donc, et qui n’a pas eu de mal à traverser l’Atlantique pour se propager dans les caves de Brooklyn, et déteindre sur les guitares de Liars, Rapture et forcément Interpol.
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