Lundi 29 mai, Alexandre Rallis vous invite à dynamiter vos clichés sur la Grèce. A sa table : vin naturel, feta, huile, miel, poutargue…. revisités par la main (et le couteau) avisés de cuisiniers de haute voltige.
Paris s’apprête à accueillir un événement inédit qui sent bon le thym et l’olivier. Le 29 mai prochain, déclarez-vous souffrant, posez un RTT, appelez la nounou, fermez boutique ou fuyez vos révisions pour vous payer une tranche de Grèce, de Kalamata plus précisément, cette ville située au sud du Péloponnèse et mondialement connue pour ses olives noires de qualité. De 11 h à 19 h au Pavillon du Lac (dans le parc des Buttes-Chaumont, Paris XIXe), le Banquet va vous offrir ce que cette région a de meilleur, et vous remplir non seulement l’estomac, mais aussi les oreilles et peut-être même l’esprit…
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Initié par deux “passeurs”, Alexandre Rallis (fondateur de la maison Profil Grec proposant des huiles exceptionnelles et autres mets helléniques), et son compère Georgios Loannidis (importateur de vins naturels grecs et italiens pour Oenos), le Banquet invitera ainsi une quinzaine de producteurs et de vignerons grecs à la capitale pour présenter à un public de professionnels mais aussi de curieux le fruit de leur travail (pour la somme symbolique de 5 euros).
Ce sont ces mêmes artisans, hommes et femmes, qui travaillent du 1er janvier au 31 décembre pour fournir Alexandre et Georgios en vins, feta, huile d’olive, olives, poutargue, sauge, miel… Ces produits d’exception étant livrés à plus de 150 restaurants et épiceries, principalement à Paris.
Une rencontre inédite entre producteurs et restaurateurs (et clients)
A la table du Banquet, on trouvera Nikos Memmos, artisan basé à une trentaine de kilomètres au nord de Kalamata dans un tout petit village. Il produit une feta artisanale (et exceptionnelle), servie aux plus grandes maisons parisiennes et qui a bien failli être abandonnée. En effet, il y a quelques années, Alexandre Rallis sauve cet artisan de la faillite alors qu’il a près de 40 000 euros de dette à une grande surface locale en séduisant des étoilés avec son fromage de brebis. Aujourd’hui ce sont 4 tonnes de feta produites par an et 15 % de son chiffre d’affaires qui provient de son exportation vers la France. “Il fait un boulot de dingue. C’est typiquement un exemple de l’artisanat européen idéal qu’on a envie de défendre” surenchérit Alexandre.
Vous pourrez aussi goûter aux miels de M. Sentementes, à l‘huile d’olive de Profil Grec et à la poutargue (œufs de mulet séchés) mondialement connue de la famille Trikalinos, réputée jusque dans les cuisines des frères catalans Roca (à la tête d’un des meilleurs restaurants du monde : El Celler de Can Roca à Gérone). Mais ce n’est pas tout, un stand de souflakis, ces populaires brochettes de porc servis dans des pains pita, viendront vous remplir la panse accompagné d’un vin de producteur sélectionné par Georgios Loannidis :
“On fera des associations, par exemple les vins sublimes produits à Santorin par Mr. HATZIDAKIS, se marient exceptionnellement bien avec la poutargue.”
L’autre idée d’Alexandre, c’est de faire du Banquet un choc des cultures : “Ce qui m’intéresse, c’est comment un produit de base en Grèce est réinterprété à Paris par les chefs. Un exemple avec la feta que j’ai déjà vue congelée puis râpée sur un tartare !” Lors de cette rencontre : un stand gastronomique et un chef réinventera donc des plats grecs pour sublimer la matière première de ses producteurs. Tout ça dans un esprit convivial et familial : “Le soir il y aura aussi des copains qui feront leur cuisine.”
Redonner confiance à un pays maltraité par la crise
Ces rencontres sont la base du travail d’Alexandre et de Georgios qui passent chaque année plusieurs mois sur le terrain pour rencontrer des artisans et producteurs aussi exigeants qu’eux, pour répondre au souci d’excellence de leurs clients restaurateurs. Le Banquet c’est donc aussi pour Alexandre une façon de valoriser la Grèce en tant que pays producteur, de redonner confiance à un pays maltraité par la crise. Et de faire avancer les choses. Et peut-être même de créer des élans et nouvelles dynamiques ici en France :
“La Grèce c’est un pays assez paradoxal qui a énormément de confiance en lui mais aussi de doutes. Il y a un mélange très méditerranéen sur l’idée d’une fierté de civilisation mais en même temps cette phase de doute permanent sur ce qu’elle est, à cause de tout ce qui s’est passé notamment les drames économiques ”
Comme exemple de success story, on rencontrera aussi Sotiris Lymberopoulos, qui à 35 ans est à la tête de la troisième société grecque à exporter des primeurs de petits producteurs locaux, et distribuer ces citrons et oranges via Alexandre en Europe et à Athènes. “C’est un mec en or ! Un exemple parfait qui a utilisé la crise économique non pas comme un fardeau mais une opportunité de développement pour lui-même mais aussi pour la Grèce, via un changement professionnel et une adaptation aux demandes. “
Profil Grec, une maison d’excellence
C’est d’ailleurs sur fond de crise économique et désir de retour à la terre qu’Alexandre Rallis réussit en 2008-2009 le pari de lancer son commerce d’huile d’olives : Profil Grec. Né en 1984 et grandissant sur les bords de l’Oise auprès de parents écolos qui l’initient très jeune à l’indépendance énergétique, ce Franco-Grec voit le commerce d’huile comme une « indépendance alimentaire » :
« L’huile, c’est quelque chose de fondamental en Grèce. Chaque famille doit avoir son oliveraie et faire son huile pour sa consommation personnelle. La consommation est d’environ 20 litres par personne et par an, contre 2 en France ! D’où le côté vital de l’huile, c’est la vie en Grèce. »
Originaire de Kalamata, village noyé sous les oliviers, entre mer et montagne (le Taygète), Alexandre multiplie les aller et retours entre la France et la Grèce depuis sa plus tendre enfance, et a toujours cherché un moyen de faire le pont entre les deux professionnellement.
Après des études en histoire et sociologie, il part en Grèce pour les traditionnelles récoltes familiales d’olives entre décembre et janvier, sur les champs que sa grand-mère lui a transmis. C’est alors qu’il a le déclic en observant des productions parcellaires, chacune exploitée par une famille. Son constat est le suivant : il est temps de faire remonter en gamme l’huile d’olive grecque qui a très mauvaise presse, grâce à un développement local et durable bannissant les mélanges :
« C’est un peu comme monsieur Jourdain, qui faisait de la prose sans le savoir. Tous les Grecs font de l’huile parcellaire et ont pour la maison des huiles qui sont fabuleuses. Mais dès qu’on est dans l’idée d’exporter, on pense à une économie de masse comme c’est un produit qui est facilement mélangeable, d’ailleurs l’huile est l’un des produits qui est le plus coupé au monde. C’est pour cela qu’on retrouve des produits catastrophiques en supermarché. »
Défendre des produits locaux de qualité, mais aussi ses petits producteurs
Le credo d’Alexandre et de Profil Grec est donc simple : rester dans cette vision familiale de parcelle, défendre des produits locaux de qualité, mais aussi ses petits producteurs. Une logique raisonnée et militante qui répond à des questions évidentes : qui, où, comment, quand…
« On ne défend pas l’étiquette bio, on défend toujours le goût.”
Et pas non plus question de mettre la pression pour faire baisser les prix à des producteurs qui essayent de gagner leur vie dignement : “Pour l’huile d’olive, on achète presque deux fois plus cher que les cours. On a un cahier des charges précis et des demandes exigeantes aussi.” Cette exigence a un coût, car il faut du suivi, mais répond aussi à une demande. Celle de la bistronomie française qui exige un sourcing très précis et en plein boom lors de la création de Profil Grec.
La première année, en 2009, Alexandre ramène ainsi 400 litres d’huile produite sur ses terres et celles de son oncle et réussit à convaincre des maisons de qualité comme le Chateaubriand, le Baratin ou encore Quedubon. Il livre alors en scooter et entrepose dans sa cave les bidons d’huile. Au fil de rencontres, Profil Grec se développe et se constitue un réseau de clients fidèles avec qui il tisse des liens voire des amitiés solides :
“ Aujourd’hui, on fait autour de 12 000 litres d’huile d’olive. Peu à peu ça a fait tache d’huile (rires).“
Ducasse, Camdeborde, Iñaki Aizpitarte… tous les grands chefs adoptent Profil Grec
Désormais, Alexandre peut se féliciter de travailler avec 150 maisons parisiennes dont notamment le trois étoiles l’Arpège, du chef Alain Passard, une grande rencontre. C’est une petite entreprise de 3 personnes (Alexandre Rallis, Aggelos Marantos et Baptiste Lorre) avec un employé à Kalamata, qui fait le suivi de parcelle et tient le cahier des charges. Mais ça reste avant tout une histoire de famille et d’amitié. Par exemple, pour différencier ses parcelles d’oliviers, Alexandre leur donne des prénoms féminins d’amies venues en Grèce pour participer à la récolte.
En plus de l’huile d’olive et sur demande des restaurateurs avec qui il travaille, Alexandre importera d’autres produits tels que la feta, les olives, le miel… Mais leur produit de référence restant l’huile d’olive, « c’est une bataille de tous les fronts pour sortir de belles huiles chaque année ». Profil Grec tâchant de répondre aux demandes les plus particulières des restaurateurs :
« Par exemple, on travaille avec monsieur Camdeborde, Yves va demander une huile un peu plus douce, plus légère, pas trop présente. Alors que Sven Chartier de chez Saturne, va demander une huile beaucoup plus présente. Ou plus puissante. Donc l’idée c’est d’avoir un panel d’huile d’olives et de pouvoir faire un suivi. »
Kalamata-sur-Seine, la nouvelle boutique de Profil Grec
Depuis l’an passé, la boutique vitrine-showroom-bureau nichée sur les hauteurs de Belleville et bénéficiant d’une terrasse ensoleillée, est devenue un lieu de rencontre pour ses clients : « Il y a monsieur Ducasse qui est passé début avril, c’est très gratifiant. Quand les chefs viennent ici, eux qui sont toujours sous pression, ils sont comme en vacances.” Il faut dire qu’il y fait bon vivre et que le rythme méditerranéen aura vite fait de vous contaminer.
Et bien que ça ne soit pas une épicerie, les particuliers peuvent tout de même acheter ses produits comme l’huile d’olive au litre ou la feta. “Et si vous m’êtes sympathique je pourrais même vous faire un café.” plaisante Alexandre.
Le Banquet : RDV lundi 29 mai de 11h à 19h au Pavillon du Lac (dans le parc des Buttes Chaumont, Paris 19e). Entrée 5 euros. Evénement facebook
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