La dernière création de Sophie Perez s’apparente à une revue de détail haute en couleur et pince sans rire conçue pour dénoncer les vices de la conjugalité.
Échappatoire réputée infaillible pour briser les carcans de nos solitudes, le fantasme du bonheur de la vie à deux se dissèque avec une trouble délectation dans La Meringue du souterrain.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Une opportunité saisie par Sophie Perez pour s’armer du scalpel de l’inconscient et démembrer façon puzzle les dépouilles de nos romances à la manière d’un cadavre exquis.
Créé dans un monde à l’arrêt pour cause de crise sanitaire
La troupe a profité des béances offertes par la pandémie pour inventer un spectacle qui se réclame d’un “sauve qui peut la vie“. L’opportunité d’accoucher aux forceps d’une mise à nu des âmes dans un drôle de cirque de l’intime. Ici, les outrances du burlesque s’accordent aux jeux de l’enfance tandis que les codes de la courtoisie entre amants se négocient en trois temps sur le grill de l’amour vache en se déclinant de bleu à saignant et à point.
La scénographie oscille entre le stand d’un vide-grenier dédié à l’art forain et l’installation d’artiste. Manière de briser d’emblée le quatrième mur, l’espace de jeu gagne du terrain sur la salle avec des pièces placées dans les rangs du public. Dans ce capharnaüm dédié à Lon Chaney, l’homme aux mille visages du cinéma pionnier, on trouve une collection de meringues géantes, un trésor de pierres précieuses et des croûtes chinées au marché aux puces. Il fallait ériger un totem pour se lancer dans cette chasse aux tabous… Occupant la place centrale sur le plateau, une sculpture immortalise les narines et la bouche de la fameuse pochette du disque In the Court of The Crimson King, considérée par les fans comme la version pop du Cri d’Edvard Munch.
No futur
L’exploration de la carte du tendre s’apparente à du crapahutage au milieu d’un champ de mines. Sophie Lenoir et Stéphane Roger en profitent pour jouer les transformistes en s’emparant des figures de Pinocchio, Delphine Seyrig ou Sherlock Holmes. Entre un quizz culturel et un DJ set, l’exhibition se décline en quatre chapitres et un épilogue, qu’un complice à tête de monstre annonce sur des cartons pareils à ceux des films muets. Au-delà du défilé de figures grotesques incitant à la caricature, il se distille au fil de la représentation une vérité et une pudeur qui désarment et bouleversent. En faisant un sort à la mélancolie des illusions perdues, La Meringue du souterrain est une cavalcade qui se réclame d’un parcours à travers les terres brûlées du passé tout autant que de l’éloge d’un demain résolument no futur.
La Meringue du souterrain, conception et scénographie Sophie Perez. Avec Sophie Lenoir et Stéphane Roger.
Du 23 au 26 juin, Grande Halle de la Villette, Paris.
Du 5 au 7 octobre, dans le cadre du festival Actoral, La Criée, Marseille.
Du 19 au 22 janvier 2023, Arsenic-Centre d’art scénique contemporain, Lausanne (Suisse).
{"type":"Banniere-Basse"}