Du funk au free, du planant à la fanfare, toutes les bonnes vibrations du jazz français à travers dix albums flamboyants.
Fred Pallem & Le Sacre du Tympan, Soul Cinema !
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Bassiste, producteur, chef d’orchestre, Fred Pallem est un bon génie : tout ce qu’il touche devient lumineux, intelligent, fascinant. Son jeu marqué par les basses charnues de John Barry et Serge Gainsbourg et sa direction élégante sont au service aussi bien de la meilleure pop française (Barbara Carlotti, Daphné, Lafayette, Clarika…) que de la musique instrumentale. Après avoir rendu un superbe hommage à François de Roubaix, le Sacre du Tympan, son big band, arpente cette fois les rues chaudes et crades du Harlem des années 70 avec les grands thèmes de la Blaxploitation en bande-son. Funk tortueux, duels de cuivres affutés et susurrements de loulous en rut sont au programme, restitués avec une classe impériale.
Endless, Lost Lake
Rarement, trop rarement, il arrive qu’un disque réponde à une attente que vous ne soupçonniez pas, comble un vide que vous ignoriez, ouvre en vous de nouvelles fenêtres sensorielles. Ainsi, la lumière de Lost Lake déborde de partout, et elle n’attend pas pour vous submerger : de la première à la dernière note, tout est aussi imprévu qu’à sa place dans cet album, fragile suspens du temps opéré par Endless, soit David Haudrechy au soprano et Grégoire Aguilar au piano. S’il vous faut encore une preuve que le salut viendra de la beauté, plongez-vous dès le 19 mai dans les mouvances infinies de Lost Lake.
François Poitou, Funambule
Le titre est bien choisi : on progresse ici à pas légers, en équilibre sur des cordes (contrebasse, violons, alto, guitare) ou un souffle (de soprano ou de clarinette basse), dans un clair-obscur feutré où glissent chuchotis secrets, non-dits et rires étouffés. Aucun éclat dramatique, aucune intrusion de paillettes dans ce monde de velours noir – pas même quand se profile l’ombre redoutée de Mathieu Chédid à travers une reprise de Ne le dis à personne. Gracieux et d’une élégance étourdissante, ce premier album capitonné, à explorer en voleur appliqué, dévoile en François Poitou un contrebassiste et compositeur déjà parfaitement maître de ses moyens. Sortie le 26 mai.
Electric Vocuhila, Kombino Splinto
Ce pourrait être la réédition de quelque vieille cassette enregistrée au Zaïre, en Ethiopie ou à Madagascar dans les années 70, pourtant ce disque date bien de 2017 et on le doit à quatre Français. Interprètes d’une musique aux sonorités vintage où s’entremêlent motifs inlassablement répétés, rythmes tachycardes et fureurs expressives des possessions africaines, les sapeurs blancs d’Electric Vocuhila démontrent que l’esthétique peut échapper au conditionnement des origines et des territoires pour se propager d’âme en âme, par la seule magie des sons. Sortie de l’album le 30 mai, à retrouver au Studio de l’Ermitage le 28 juin.
Big 4+1, 7 Years
Quelle était l’atmosphère au Triton durant ces deux soirs de mai 2016 ? A l’écoute de ce live tout de frénésie, de tripes brûlantes, de cris éperdus et d’oppressions renversées, elle dût paraître exaltante autant qu’étouffante. On se sent là comme dans une serre chaude et on retrouve tout ce qui fait de Big 4 (augmenté, pour la célébration de ses 7 ans d’existence, du trompettiste Quentin Ghomari) un groupe si singulier et nécessaire : de l’urgence, du vif, du cru, une bonne dose de loufoquerie et d’irrévérence, de la pertinence musicale et aucun souci des lignes toutes tracées, bref, tous les caractères d’une démarche véritablement aventureuse, donc précieuse.
Srdjan Ivanovic Blazin’ Quartet, La mer, la pierre, la terre l’oiseau
Le nom à rallonge de l’album l’indique clairement : la nature va parler, chuchoter ces secrets que l’esprit seul reçoit et que le musicien, dirigeant les vibrations de l’air, saura à son tour communiquer. Pour le batteur Srdjan Ivanovic, c’est là toute l’affaire, musicale aussi bien que spirituelle, et elle commande de savoir s’entourer pour arriver à ses fins. En Christophe Panzani (ténor et clarinette basse), Andreas Polyzogopoulos (trompette) et Mihail Ivanonv (contrebasse), il a trouvé les meilleurs partenaires possibles pour traverser l’espace de ses compositions en lents vols planés, plongées vertigineuses et jaillissements libérateurs.
El Strøm, Long Time No Sea
La première impression est câline : petite boîte à musique et voix douce nous affirmant que la liberté existe, ce que nous sommes tout prêts à croire, comme à n’importe quel conte de l’enfance. Et puis, rapidement, ça se détraque et on décolle vers un territoire sans balises, hors-monde, traversé de transes obsédantes, d’étranges ruminations vocales et tripatouillages qui déconstruisent le sens, déroutent, égarent, ravissent. Le paysage s’élabore en collages et zigzags aléatoires et c’est toute une anarchie fantasque, drôle et vivante à laquelle nous invitent l’expérimentateur compulsif Jean-Jacques Birgé, la chanteuse Birgitte Lyregaard et le percussionniste Sacha Gattino. La musique si neuve d’El Strøm nous vient sans doute d’un lointain futur : la seule chose dont on est sûr, c’est qu’on ne s’y ennuie pas.
Antoine Galvani, Suite astrale
Entre le jazz et les astres, c’est une vieille histoire d’amour (suprême), l’échelle cosmique reflétant le plus souvent, chez le musicien qui l’emprunte, une aspiration à une liberté totale, à l’orée du langage. Plus proche de Holst que de Coltrane, le pianiste Antoine Galvani (a.k.a Ahn Tuan) a quant à lui repris la forme du poème musical, procédant, à la tête de son quartet, par mouvements tour à tour calmes et impétueux, tonals et parfois atonals, instants de communion à la messe psychédélique et retours aux babillages de l’enfance, le temps passant cul par-dessus tête, au dessus des comètes. Semblable voyage, toujours risqué, ne doit pas se manquer.
Yves Rousseau & Christophe Marguet 5tet, Spirit Dance
Entre le contrebassiste Yves Rousseau et le batteur Christophe Marguet, l’alliance est de longue date, au point que leurs compositions, souvent troubles, nerveuses, émotives, ne se démêlent plus. Fruit d’une émulation qui paraît avoir gagné chacun, de Fabrice Martinez (trompette) à David Chevallier (guitare) et Bruno Rude (claviers), tous très inspirés, Spirit Dance sonde l’invisible, l’impalpable, ce qu’il peut rester d’une nuit solitaire ou d’un parfum éphémère, d’une acrobatie risquée ou d’une danse dans le vent et en tire une musique toute d’espoirs invaincus et d’exaltations intimes.
https://www.youtube.com/watch?v=_zw7gFMCHRs
Les Fanflures Brass Band, Dans ta face !
Le titre de l’album fait craindre le pire, mais les premières notes rassurent et, bien vite la gaieté qu’il délivre devient contagieuse. On est en fanfare et l’envie de s’amuser prime sur tout. Alors, on descend dans la rue et pour que la fête soit parfaite, la dizaine de cuivres et percussions toulousains se dépense sans compter, n’oubliant pas pour autant de caler ses grooves aux titubations d’un carnaval de haut vol et de lancer ses solos dans l’air printanier. Un peu funk, un peu jazz, totalement fun, ces Fanflures Brass Band réussissent finalement à nous mettre leur sauce dans la face sans jamais nous prendre la tête.
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