Succès démentiel de « Cinquante nuances de Grey » et déferlante de copies : aucune nuance dans le désir collectif de soumission?
Petite figure de la mode spécialisée dans le bijou « sexuel » (bagues et colliers-boules à masturbation, en or et en argent, colliers-fouets, etc.) Betony Vernon publie ces jours-ci The Boudoir Bible chez Rizzoli (pas encore traduit). Parce qu’elle a remarqué, d’abord avec sa collection de bijoux (pourtant « normalisée » puisqu’en vente chez Colette), puis en parlant de ses goûts sexuels (pour aller vite : le bondage) sans tabou, que le premier réflexe des gens était de la « catégoriser » dans le sado-masochisme. Or, selon elle, toute catégorisation ressemble à une forme de jugement moral, donc de limitation, dans une société où le sexe est partout mais le plaisir encore tabou. Elle a écrit The Boudoir Bible, mix d’anthropologie, de biologie et d’esthétisme, pour aider à mieux connaître le corps donc à mieux le faire jouir. Une fille qui se plie à « tout ce que voudra »… un pdg milliardaire !
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Elle a sans doute raison, car on se demande si le succès effarant de Cinquante nuances de Grey (les volumes 1 et 2 squattent les deux premières places du top 20 de Livres Hebdo) ne relèverait pas d’une frustration collective en matière de fantasmes non assumés et de plaisir rarement atteint. D’autant que sa copie, 80 notes de jaune, vient d’entrer dans le classement des meilleures ventes, et que s’apprête à sortir Tout ce qu’il voudra sur le même scénario : une fille qui se plie à « tout ce que voudra »… un pdg milliardaire ! Mais c’est là où le bât commence à blesser : ces fantasmes de soumission à échelle collective ne révéleraient-ils qu’un état d’esprit moutonnier, un désir de se plier au pouvoir, c’est-à-dire, aujourd’hui, à l’argent roi ? Une société occidentale régressive dont le désir secret des êtres serait de devenir les serfs de l’argent ? Du moment que le fouet est serti de diamants…
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