Une série signée Kasumi Yasuda et un récit complet d’Eldo Yoshimizu explorent la possibilité de transformer, par exemple, les humains en plantes. Une métamorphose bienvenue ?
La représentation de la nature fait partie des grandes thématiques de la bande dessinée, notamment dans son imbrication avec le corps humain, ses manières d’interagir avec lui, les façons dont ils existent ensemble, côte à côte, séparément ou (tout) contre l’autre.
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L’un des sommets de cette confrontation est une série de comics, américaine, nommée Swamp Thing, qui démarra comme une BD classique de super-héros dans laquelle un personnage devient monstre issu des marécages. Reprise par Alan Moore dans les années 1980, cette même BD inversa le propos en définissant son personnage non plus comme un humain devenu plante mais comme une plante, ou un ensemble végétal, se pensant humain. Qui est le plus humain des deux ? Quelle condition est la plus naturelle ?
Deux mangas récemment sortis relancent cette problématique, qui, à l’aune, des développements écologiques et climatiques récents, devient plus prégnante encore, dépassant la fiction. Dans Fool Night de Kasumi Yasuda, des humain·es deviennent des plantes. Dans Hen Kai Pan d’Eldo Yoshimizu, fable post-écologique, l’être humain n’a d’autre finalité que d’être dépassé par la nature à laquelle il inflige le pire traitement. Celle-ci aura toujours le dessus.
De belles recherches esthétiques
Les deux livres augurent d’un pessimisme sombre mais aussi d’une volonté de démontrer que quelque chose triomphe de l’acte humain, quel que soit son degré de violence et de puissance.
Dans Fool Night, tout est question de choix : dans un monde quasiment mort, n’est-il pas préférable de devenir un arbre pour fournir de l’oxygène aux autres et ne plus souffrir soi-même ? Dans Hen Kai Pan, la question tient plutôt à cette main invisible qui mène à l’assimilation totale de l’humain avec la nature et sa métamorphose finale en autre chose, une autre espèce.
Faire se confondre les formes, les corps dans la nature, les arbres dans les êtres humains
Le manga est idéal pour représenter ces sujets : le temps long de la série (pour Fool Night) et la possibilité de l’expérimentation graphique (pour Hen Kai Pan) permettent au dessin de figurer des choses inédites, des manières expérimentales de faire se confondre les formes, les corps dans la nature, les arbres dans les êtres humains, et inversement.
La conclusion de chaque livre cible cela, et c’est peut-être ce qui séduit d’abord : cette recherche esthétique tentant d’imaginer un futur dans lequel le monde subirait entièrement les conséquences de questions irrésolues liées à l’écologie politique et à des catastrophes, comme les explosions nucléaires, qu’elles soient provoquées ou involontaires.
Fool Night Tome 1 de Kasumi Yasuda (Glénat), traduit du japonais par Hana Kanehisa, 228 p., 7,60 €. En librairie (tome 2 à paraître le 24 août).
Hen Kai Pan d’Eldo Yoshimizu (Le Lézard noir), traduit du japonais par Sébastien Raizer, 192 p., 18 €. En librairie.
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