De passage à Londres pour rencontrer Arcade Fire, je ne pouvais pas manquer l’occasion de passer un soir par le Cafe OTO.
Haut lieu de pratique des musiques contemporaines et expérimentales, et terrain de jeu favori des artistes free jazz en quête de nouvelles frontières à dépasser, ce café atypique situé dans le district de Dalston (nord-est de la ville, à Hackney) est une institution dont m’avait parlé le musicien Daniel Blumberg il y a quelques années.
L’ancien leader de Yuck et Cajun Dance Party, obsédé par l’improvisation musicale, en avait fait son QG. Poussé par d’autres habitués que sont le percussionniste Eddie Prévost (membre de l’AMM, groupe de jazz axé sur l’impro), le saxophoniste Seymour Wright ou la violoncelliste Ute Kanngiesser, il avait sorti Minus (2018), un premier album pas tout à fait émancipé du format chanson, mais déjà enclin à donner libre cours à toutes sortes de digressions instrumentales.
Ce jeudi 28 avril, c’est le label Black Truffle Records qui régale, et la tête d’affiche s’appelle Oren Ambarchi (au menu encore, l’Australienne Judith Hamann et le duo Ora Clementi). L’ Australien, proche collaborateur de Jim O’Rourke (entre 1000 autres) et dont l’œuvre est à l’image de l’univers, exponentielle, a régulièrement été cité dans les Inrocks – notamment il y a huit ans, à l’occasion de la sortie de l’immense Hubris (2016), constitués de trois longues plages en forme de cavalcade kraut.
Oren la joue ainsi solo, dans une pénombre de monastère, entouré d’un public de fidèles à la limite de la dérive sectaire. De là où je suis, j’aperçois beaucoup de fils et des pédales d’effets. Oren est armé d’une guitare, dont il fait vibrer les cordes une par une, patiemment, de sorte à envoyer un signal électrique à toute sa machinerie, avant de jouer avec les sons et de les faire danser dans l’atmosphère. Du chaos survient alors la lumière ; de l’indicible apparaissent les patterns ; du néant surgit toute une cosmogonie. Une autre histoire du monde.
Correction : Oren Ambarchi nous informe que, contrairement à ce qui avait été écrit, il n’utilise pas de synthétiseur modulaire. Notre placement dans la salle ne nous permettait pas d’identifier clairement le matériel utilisé. L’article a donc été modifié en conséquence.