Epinglé par le Canard Enchaîné pour ses deux appartements parisiens, Christian Estrosi a organisé une visite guidée. Le ministre de l’Industrie n’est pas le premier politique à essuyer des reproches sur son logement : chaque mis en cause répond à sa manière.
Christian Estrosi : le tourisme industriel
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L’avantage du Canard Enchaîné, c’est que si le commun des mortels l’achète en kiosque le mercredi, les ministères se ruent dessus dès le mardi après-midi. Ce qui laisse le temps, quand on voit son nom en page 3 (mauvais signe), d’organiser la riposte. Imaginons le ministre de l’industrie, hier. Il se doute de quelque chose, puisque le Canard l’a appelé pour lui demander c’est quoi cette histoire d’appart’ où il loge sa fille alors qu’il a déjà un logement de fonction à Bercy.
Malin, le pétaradant ministre décide d’organiser l’Estrosi Tour, façon les 24 heures du Mans chez moi en dix minutes. Il convie les journalistes, chiens de garde de la démocratie et des bonnes moeurs immobilières, à une visite privée de son appartement de fonction rue de Lille, où il dit loger avec sa fille (voir la vidéo de nos confrères de Rue89).
Ses services font ensuite voir aux journalistes le logement mis à disposition par le ministère à Bercy (voir la vidéo)
Trans-pa-rence. Chic, se disent les médias, ça fait de bonnes photos et c’est vachement marrant d’aller chez le ministre. Pari risqué mais plutôt réussi, même si les râleurs de la presse gauchiste trouvent encore le moyen de critiquer parce que c’est pas tellement des taudis et qu’il y a même pas d’électroménager. Certains visiteurs sous-entendent que le ministre n’habite peut-être pas là.
Georges Tron : ma quittance en PDF
Accusé par Le Canard enchaîné du 24 mars de profiter d’un HLM coolos (118 m2 dans le XVe) pour pas cher (1200 euros), le secrétaire d’Etat à la fonction publique balance sa quittance de loyer à Rue89. Il loue l’appartement 1400 euros par mois dans un immeuble à loyer normal, il a le droit.
Hervé Gaymard : expulsion locative en pleine trêve hivernale
Pauvre, pauvre Hervé Gaymard. En 2005, la tempête s’était abattue sur le ministre des Finances comme l’ISF sur l’Île de Ré. « Monsieur 600 mètres carrés », on l’appelait au bar du coin. Le modeste logement où il rangeait ses huit enfants coûtait 14000 euros par mois à l’Etat.
Sans doute en proie à un flip total, Gaymard avait commencé par mentir : « Evidemment, si je n’étais pas le fils d’un cordonnier-marchand de chaussures, je n’aurais pas de problème de logement. Je serais propriétaire de mon appart et il n’y aurait pas toute cette affaire !» Bam, ça pardonne pas : la presse révèle que le mal logé possède un appartement à Paris, qu’il loue, et d’autres biens en Savoie.
Bilan : déménagement, démission, remboursement des loyers (58894 euros), honte éternelle et « jurisprudence Gaymard ». Le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin décide que les ministres propriétaires d’un logement à Paris ne pourront plus vivre sur le dos de l’Etat. En cas de besoin, ce sera 80 mètres carrés et 20 mètres carrés supplémentaires par enfant. Depuis 2007, les ministres paient la taxe d’habitation.
François Fillon : la tactique de la paillotte
En juin 2009, le Canard souligne la croissance subite de l’appartement du Premier ministre, passé de 78 m2 à 309 m2 (dont 213 m2 pour la partie privative). Que s’est-il passé? Rien. En gardant le silence, François Fillon a joué le coup en excellent technicien de surface.
Jean-Paul Bolufer : de Port-Royal à Bercy
Décembre 2007 : on apprend que le directeur de cabinet de Christine Boutin (à l’époque ministre du logement) vit depuis 1981 dans un 190m2 de la Régie immobilière de la ville de Paris, près de Port-Royal (Ve arrondissement) pour 1200 euros par mois.
Le dircab affirme à la télévision qu’il ne voit «aucune raison objective de le quitter». Dans une interview au Parisien, il se dit «prêt à rediscuter les conditions de (s)a location» mais victime d’une « chasse à l’homme ».
Pourtant, à la demande de François Fillon (l’homme qui pousse les murs, voir plus haut), Jean-Paul Bolufer démissionne. Il déménage au bout de neuf mois et se recase à Bercy comme contrôleur général économique et financier, chargé de traquer les abus.
Dans le cas de Jean-Paul Bolufer comme pour Georges Tron, Fadela Amara, la directrice de cabinet de cette dernière ou encore Jean-Pierre Chevènement, la réglementation ne leur imposait pas de quitter leur logement, même si se posait une question morale.
Alain Juppé : le piston du fiston
En 1995, le Canard enchaîné révèle qu’Alain Juppé, alors Premier ministre, a fait arrondir le loyer de son fils, logé par la ville de Paris dans 88 m2, à 6000 francs au lieu de 7000. « Droit dans ses bottes », Juppé explique avoir voulu « éviter un dérapage généralisé des loyers de la ville de Paris ». Par ailleurs, le Premier ministre dispose d’un logement de 181m2, propriété de la Ville de Paris également, rue Jacob (VIe) 12 000 francs par mois. Alain Juppé et ses enfants ont déménagé pour éviter des poursuites.
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