Les Australiens démontrent sur leur troisième album “Endless Rooms” tout leur savoir faire en matière de songwriting et de refrains accrocheurs, s’autorisant même quelques pas de côté.
Dans le racket de l’indie pop comme dans celui de l’informatique, les changements se font de façon incrémentale pour que le moindre frétillement d’évolution ne vienne pas enrayer une machine déjà bien huilée. Généralement, quand l’affaire est bien menée, le public, ou l’utilisateur·trice, n’y voit (presque) que du feu, mais réalise l’ampleur des révolutions en cours après un peu de recul.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
C’est ainsi que l’on n’est pas foutu·e de se souvenir de l’interface d’un vieux système d’exploitation pour Mac et que l’on passe d’un Pablo Honey (1993) à Amnesiac (2001) quand on s’appelle Radiohead. Mais il arrive aussi de ne voir poindre aucun bouleversement de paradigme à l’écoute du nouvel album d’un groupe adoré, malgré nos tentatives contrariées d’y déceler une boule à facettes et trois incursions de clavier, quand ce dernier s’est fait le chantre d’une jangle pop nerveuse et carillonnante.
RCBF au patrimoine mondial de l’Unesco ?
Les Australiens de Rolling Blackouts Coastal Fever, puisque c’est d’eux que l’on parle, donnent ainsi l’impression de sortir le même album depuis trois albums, donc depuis toujours. En moins bien, diront certain·es, l’urgente excitation des débuts, qui faisait de Hope Downs (2018) un premier disque d’une richesse mélodique folle, s’est muée en formule efficace, mais attendue, alliant motifs de guitare ciselés et batteries en pleine cavalcade.
Il faudrait néanmoins être de mauvaise foi pour dire qu’Endless Rooms relève de la pâle copie. Défendant l’idée que la quête perpétuelle de la nouveauté est vaine si l’on n’est pas prodigieux·ieuse, on se satisfera de retrouver un groupe intact, dont on sent la volonté farouche de remonter sur scène. De faire danser, même, si l’on en croit les quelques toiles de fond disco qui parsèment le disque, comme sur Blue Eye Lake, et de s’ouvrir à des exercices un peu nouveaux (l’excellent Dive Deep).
Quant à la mécanique RBCF, elle a encore de beaux jours devant elle. Au point de se demander si ces jeunes gens que l’on imagine biberonnés à la compilation C86 du NME n’ont pas l’ambition d’inscrire leur savoir faire en matière de refrain au patrimoine mondial de l’Unesco.
Endless Rooms (Sub Pop/Modulor). Sortie le 6 mai. Concert le 19 juin à Paris (La Maroquinerie).
{"type":"Banniere-Basse"}