Ce programme de performances chorégraphiques fait écho à l’exposition “Bruce Nauman : Contrapposto Studies”. Décryptage.
Réunir les chorégraphes William Forsythe, Pam Tanowitz, Ralph Lemon et Lenio Kaklea pour “dialoguer“ avec l’artiste Bruce Nauman, le temps d’une série de performances, n’est pas une mince affaire. L’exposition actuellement consacrée à Nauman à la Punta della Dogana met en avant son utilisation pionnière du corps à travers différents médias. Dès lors, peut-on interpréter Dancing Studies comme un “commentaire” de l’exposition de Bruce Nauman, voire comme son prolongement “vivant” ?
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Pour Carlos Basualdo, commissaire de ce programme avec Caroline Bourgeois, la réponse est ouverte. “Les deux, je dirais. On peut espérer que les ‘réponses’ des chorégraphes à l’exposition, en tant qu’œuvres d’art, transcenderont leur cadre d’origine pour acquérir une vie propre. Nous nous sommes servis de l’exposition, pourrait-on dire, comme d’un outil ou d’un tremplin pour engendrer des idées qui, nous l’espérons, compléteront et dépasseront à la fois ce cadre.”
William Forsythe propose ainsi une sélection de 52 portraits et des vidéos de performance. Ralph Lemon imagine un travail composé de fragments élaborés au cours de ses années de recherche sur le mouvement, le texte et le son. Lenio Kaklea, quant à elle, reprend le troublant Sonates et Interludes sur la partition de John Cage. Elle y déploie une ligne de corps comme augmentée, au sol, face à la caméra. Et interroge sa propre écriture gestuelle.
Une performance entre répétitions et représentation
Quant à la chorégraphe américaine Pam Tanowitz, que l’on découvrait l’an passé à la Biennale de Danse de Venise, elle va “ouvrir” un Dancing the Studio éphémère où répétitions et représentation s’unissent et nous confie : “J’espère exposer mon processus de création au spectateur de façon honnête, en montrant qu’aucune de ses composantes n’est plus importante qu’une autre. Le public assistera à l’élaboration d’une danse en temps réel et sera témoin de tous les aspects de ce processus. Vous me verrez négocier l’espace, le temps, la structure et la composition. Si les gens choisissent de revenir pendant les cinq jours de l’installation, ils découvriront vraiment les rouages internes de mon processus créatif, car ils verront comment il se développe et se forme au jour le jour. Dans le cadre de ce projet, le processus et le produit sont pour moi une seule et même chose.” Et la chorégraphe de conclure : “La plus grande partie de ma carrière de chorégraphe a porté sur le produit, que ça me plaise ou pas. J’ai toujours rêvé de créer une pièce qui ne soit pas focalisée sur le produit, mais qui mette en valeur et expose la manière dont je crée une danse avec mes collaborateurs.” Dancing Studies lui en offre l’opportunité.
Au final, si ces chorégraphes ont chacun une approche différente du mouvement et du geste, un lien (in)visible les relie à Bruce Nauman, selon Carlos Basualdo. “Ce qu’ils ont en commun, c’est une relation forte avec l’œuvre de Nauman, ou plutôt, une admiration partagée pour sa pratique, qui les place en quelque sorte ‘à proximité’ de son travail. Il était important pour nous de souligner cette capacité qu’a l’œuvre de Bruce Nauman d’inspirer des réponses dans un large spectre de pratiques chorégraphiques.”
Dancing Studies, Collection Pinault, Teatrino di Palazzo Grassi et Punta della Dogana Venise, du 2 avril au 19 juin 2022.
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