Un deuxième album tombé du ciel, avec la complicité de Phoebe Bridgers et Bright Eyes, où le Californien s’affirme en figure majeure de l’indie-folk. Splendeur.
Il y a les chefs-d’œuvre qu’on attend et ceux qui vous cueillent par surprise. Beginners (2020), le premier album de Christian Lee Hutson, avait su nous charmer, sans nécessairement susciter pour la suite des attentes au-delà de sa pop délicate et bien écrite, un peu second couteau raffiné façon The Lilac Time.
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Un attrait persistant, mais rien pour nous préparer à la splendeur de ce Quitters. Son envergure se déploie d’office avec évidence sur la doucement grandiose ouverture Strawberry Lemonade, pour ne jamais nous lâcher au fil de treize titres qui, sans fracas mais en nous perçant régulièrement le cœur et l’âme, rivalisent d’élégance et d’intelligence.
Un album sous le patronage de Phoebe Bridgers et Conor Oberst
On reste sidéré par l’absolue délicatesse des arrangements, et par l’humble richesse de la production. Il faut préciser que cet album a été enregistré sur bandes par la paire Phoebe Bridgers/Conor Oberst, responsables en duo de Better Oblivion Community Center qui, déjà, avait enrôlé Christian à l’écriture. La figure tutélaire de l’indie contemporaine qu’est devenue Bridgers, ainsi que l’homme derrière Bright Eyes, se sont penchés sur les chansons de Christian Lee Hutson comme on prendrait soin d’un trésor.
On ne peut que les comprendre : textes et compositions ont quelque chose d’infiniment précieux dans leur façon de saisir les états d’âme de cœurs vaguement solitaires perdus dans une Californie entre chien et loup. Un univers qui n’est pas sans évoquer, par fragments, les disques de Eels, Hutson se hissant sans peine jusqu’aux hauteurs du meilleur Everett, celui d’Electro-Shock Blues (1998) ou de End Times (2010). Et, de façon presque trop évidente, ses ballades mélancoliques évoqueront le fantôme d’Elliott Smith. Mais à la rugosité de l’écorché, il préfère une liquoreuse évanescence, un art de l’arabesque qui le relie à Paul Simon, voire à un Randy Newman ou un Arthur Lee.
Si c’est l’ensemble qui emporte par sa lumineuse cohérence, une poignée de titres s’élève encore plus haut au firmament de ce céleste album : outre Strawberry Lemonade donc, Age Difference, Teddy’s Song et Creature Feature ne cesseront de nous hanter, tant par leurs textures nimbées de mystère que par leurs rimes qu’on voudrait citer in extenso, révélant une écriture subtilement souveraine.
Comptant dans son sillage une équipe impeccable (entre autres, Meg Duffy de Hand Habits à la guitare comme chez Kevin Morby), Christian Lee Hutson affirme avec limpidité sa place de choix dans une foisonnante constellation folk pop grâce à ce Quitters qui est une réussite éclatante. Et, mieux que ça, un disque dans lequel on voudrait vivre.
Quitters (Anti/PIAS). Sortie le 1er avril.
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