À l’occasion du festival Écrans Mixtes, organisé du 2 au 10 mars à Lyon, nous avons imaginé notre top 100 des histoires d’amour et de désir LGBTQI+.
Retrouvez le début du classement de 100 à 76 par ici et de 75 à 51 par là.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Le top 100 a été réalisé à partir des classements individuels de Philippe Azoury, Emily Barnett, Ludovic Béot, Iris Brey, Romain Burrel, Alexandre Büyükodabas, Clélia Cohen, Bruno Deruisseau, Marilou Duponchel, Hélène Frappat, Jacky Goldberg, Murielle Joudet, Thierry Jousse, Olivier Joyard, Marie Kirschen, Jean-Marc Lalanne, Gérard Lefort, Jean-Baptiste Morain, Léo Moser, Camille Nevers, Théo Ribeton.
50. Céline et Julie vont en bateau de Jacques Rivette (France, 1974). Avec Juliet Berto, Dominique Labourier, Bulle Ogier
Tout le cinéma de Rivette flirte avec la tentation de repeupler le monde de personnages entièrement féminins. Dans ces mondes à la démographie majoritairement féminine, toutes les nuances du sentiment se déploient, de la violence du harcèlement sexuel (La Religieuse) à la plus ambivalente des tendresses (La Bande des quatre), de la rivalité guerrière (Duelle) à la sororité infaillible. La sororité infaillible, c’est Céline et Julie vont en bateau, une des plus belles histoires d’amour et d’amitié jamais filmées. Où comment un tandem de filles qui déminent à coup de bonbons hallucinogènes une cellule hétéro-patriarcale infanticide et polygame. Jean-Marc Lalanne
49. Les Prédateurs de Tony Scott (Royaume-Uni, États-Unis, 1983). Avec Catherine Deneuve, David Bowie, Susan Sarandon
Adaptation du roman éponyme de Whitley Strieber, Les Prédateurs, tout premier film de Tony Scott, est l’un des plus beaux films de vampire jamais réalisés. Ils sont incarnés par le couple ultra-glamour composé par David Bowie et Catherine Deneuve, tous deux au sommet de leur beauté et incarnation d’une sexualité fluide avant l’heure. Alors que des recherches scientifiques tentent de percer le mystère de l’immortalité, le vampire joué par le roi de la pop est rattrapé par le temps et sa compagne, cherchant alors une nouvelle partenaire, jette son dévolu sur une séduisante docteur (Susan Sarandon). Bruno Deruisseau
48. La Mauvaise Éducation de Pedro Almodóvar (Espagne, 2004). Avec Gael García Bernal, Fele Martínez
Sous le franquisme, deux jeunes garçons découvrent l’amour, le cinéma et la peur en même temps, dans une école religieuse où le père Manolo profite d’eux… Ils vont se revoir à dix années d’intervalle, avec des conséquences différentes pour chacun d’eux. La Mauvaise Éducation est peut-être le film le plus difficile, le moins aimable, le plus dérangeant de tous les films d’Almodóvar, puisqu’il y est question à la fois d’homosexualité et de pédophilie, sans que le film ne confonde évidemment les deux. Pour filmer traumatismes et plaisirs ambivalents, le film dessine, par un aller-retour constant entre passé et présent, réel et imaginaire, à la fois vertigineux et angoissant, sans solution. Le film se clôt par un petit mot qui grandit jusqu’à envahir tout l’écran : “passion” – qui comme chacun sait désigne à la fois la souffrance et l’amour fou. Jean-Baptiste Morain
47. Hustler White de Bruce LaBruce et Rick Castro (États-Unis, 1996). Avec Bruce LaBruce, Tony Ward
Le cinéma tendance gonzo et trash de Bruce LaBruce trouve son incarnation la plus réussie dans ce film centré autour de la fascination érotique délirante que déclenche un gigolo (sublime Tony Ward) sur un anthropologue venu étudier les soubassements d’Hollywood. Déambulation hallucinée à mi-chemin entre le soft porn, le docu improvisé et la comédie potache, Hustler White est une sorte de Querelle low budget croisée avec une version déjantée de Sunset Boulevard. B.D.
46. Naissance des pieuvres de Céline Sciamma (France, 2007). Avec Pauline Acquart, Adèle Haenel, Louise Blachère
Basé sur le scénario qu’elle a écrit en dernière année à la Fémis, Naissance des pieuvres est le premier film de Céline Sciamma. Elle y raconte la découverte de l’amour de trois adolescentes, dont deux sont éprises l’une de l’autre. Porté par une musique composée par Para One, Naissance des pieuvres suit avec une acuité rare le balbutiement du désir lesbien et marque aussi le début d’une collaboration artistique qui se prolongera douze ans plus tard avec Portrait de la jeune fille en feu. B.D.
45. La Loi du désir de Pedro Almodóvar (Espagne, 1991). Avec Antonio Banderas, Eusebio Poncela, Carmen Maura
Comme souvent dans les films d’Almodóvar, La Loi du désir part dans tous les sens, tout en n’obéissant qu’à l’énoncé de son titre. On y suit Pablo, un cinéaste au sommet de la vague, qui profite de sa notoriété pour draguer tout ce qui bouge, à commencer par Antonio (Banderas) qui se laisse séduire puis devient fou amoureux de Pablo, si fou qu’il ne supporte pas que le cinéaste voie d’autres garçons que lui. Ping-pong de plus en plus effréné autour du désir, le film vaut aussi pour l’un des plus beaux personnages secondaires de la filmographie d’Almodóvar : la personnage de femme trans joué par Carmen Maura. B.D.
44. A Single Man de Tom Ford (États-Unis, 2009). Avec Colin Firth, Julianne Moore, Matthew Goode
Premier film du glamoureux créateur de mode Tom Ford, porté par son brillant acteur principal Colin Firth (qui remporta la Coupe Volpi à la Mostra pour ce rôle), A Single Man est l’adaptation d’un roman de Christopher Isherwood, l’histoire d’un homme qui ne parvient pas à faire le deuil de l’homme qu’il aimait et qui a décidé de mettre fin à ses jours. Un film dépressif, qui sous son ripolinage de façade, son côté publicitaire, s’avère être un film tragique et sincère, profondément humaniste. A Single Man est une réussite parce que son réalisateur prend son sujet au sérieux, qu’il ne s’en écarte pas. Un film plein, direct, sans finasseries, sans distraction, stoïcien. J.-B.M.
43. Silverlake Life: The View From Here de Peter Friedman et Tom Joslin (États-Unis, 1993)
En 1993, alors que l’épidémie du sida décime la communauté homosexuelle, Tom Joslin et Mark Massi, un couple séropositif vivant ensemble depuis plus de 20 ans, décident de faire un journal vidéo pour montrer l’impact de la maladie sur leur vie quotidienne. Caméra au poing, installée au plus proche de leur intimité, le film alterne entre des moments de joie, de rires et de doutes, jusqu’à ce que la maladie s’accélère et que la mort survienne avec une rapidité effroyable. Document essentiel sur la représentation du corps malade, Silverlake Life: The View From Here est une chronique aussi difficile que sublime. Au-delà du témoignage sur la dégénérescence physique, c’est un grand film d’amour qui immortalise ce couple digne et exemplaire tout en mettant au travail la tâche difficile du survivant devant continuer à filmer l’insoutenable pour garder une empreinte, coûte que coûte. Ludovic Béot
42. San Junipero (Black Mirror, S3E4) d’Owen Harris (États-Unis, 2016). Avec Gugu Mbatha-Raw, Mackenzie Davis
San Junipero est un petit miracle dans le cadre de la série Black Mirror. Cet épisode de la saison 3 échappe absolument à la tonalité cynique et sarcastique propre à la série. Et la technologie y est l’instrument d’une émancipation des minorités, affranchies à la fois des normes de la société et de la biologie. Ainsi, nos deux héroïnes amoureuses pourront s’aimer à jamais, au-delà de leur vie réelle, au-delà de leur mort, dans un lieu magique où leur conscience sera conservée. Eternellement jeunes, éternellement ensemble, éternellement dans les années 1980. Comme le répète à l’envi dans l’épisode la chanteuse de soft rock Belinda Carlisle : “Heaven is a place on Earth.” J.-M.L.
41. Encore (once more) de Paul Vecchiali (France, 1988). Avec Jean-Louis Rolland, Florence Giorgetti, Patrick Raynal
Pari formel et sexuel, Encore, sorti en 1988, est sans doute le grand film de l’ère sida. En dix plans-séquences d’une folle virtuosité, Paul Vecchiali concentre toute son attention sur un homme, Louis, qui quitte sa femme, Sybèle, pour vivre enfin son homosexualité au grand jour. Après quelques relations sans lendemain, Louis va tomber éperdument amoureux de Frantz, avant d’être rattrapé par le mortel virus. Animé par une forme d’urgence qui n’exclut pas une authentique élégance, Encore est un inoubliable film d’amour et de mort qu’il faut redécouvrir toutes affaires cessantes. Thierry Jousse
40. Un couteau dans le cœur de Yann Gonzalez (France, 2018). Avec Vanessa Paradis, Nicolas Maury, Kate Moran
C’est dans un écrin queer et saturé que Yann Gonzalez place les amantes maudites d’Un couteau dans le cœur. Anne, réalisatrice de porno gay, doit faire face aux décès de ses acteurs, sauvagement assassinés les uns après les autres. Un drame, et pourtant, il paraît presque secondaire, car Loïs, qu’elle aime plus que tout, a “le cœur sec d’elle” comme elle le dit au téléphone dès le début du film. Alors qu’Anne plonge tout entière dans le monde de la nuit à la recherche de réponses, un jeu du chat et de la souris s’initie entre les deux femmes. Plus endiablé et brûlant que jamais, Un couteau dans le cœur dépeint un amour aussi vicié que pur au seuil des années 1980. Léon Cattan
39. Week-end d’Andrew Haigh (Royaume-Uni, 2011). Avec Tom Cullen, Chris New
Deux garçons se rencontrent en club, se draguent, couchent ensemble. A priori rien d’exceptionnel dans ce scénario. Mais à travers les quelques heures de ce week-end que les protagonistes vont passer l’un avec l’autre, Andrew Haigh (Looking) arrive à nous faire assister à la naissance d’un amour. Un film sensible et incroyablement émouvant. Marie Kirschen
38. Presque rien de Sébastien Lifshitz (France, 2000). Avec Jérémie Elkaïm, Stéphane Rideau
Avant qu’il ne se spécialise dans la réalisation de documentaires célébrant la diversité des façons de vivre son genre, Sébastien Lifshitz a réalisé plusieurs films de fiction, dont le très beau Presque rien. Avançant simultanément sur deux temporalités opposées (l’une amoureuse, insouciante et estivale et l’autre endeuillée, solitaire et hivernale), il raconte l’histoire d’amour entre deux ados qui se rencontrent en vacances sur une plage de Pornichet. Outre son excellente idée de montage, le film vaut aussi pour la beauté de son couple d’interprètes, Jérémie Elkaïm et Stéphane Rideau. B.D.
37. Dans la peau d’une blonde de Blake Edwards (États-Unis, 1991). Avec Ellen Barkin, Jimmy Smits, Perry King
L’autre Victor Victoria de Blake Edwards, sur le mode mineur (mais sur un mode majeur gay) avec lequel il forme un génial diptyque, il s’agit d’un lointain remake, comme son aîné l’était d’un film allemand, de Turnabout (Changeons de sexe, 1940), film de Hal Roach, grand producteur du burlesque muet – lieu par excellence du camp pré-code –, dont des Laurel et Hardy. Switch ou, comme son titre l’indique, l’inversion prise au pied de la lettre. On intervertit un macho de la pire espèce en une blonde incendiaire par l’opération du Saint-Esprit (hermaphrodite) et on regarde, fort de cette expérience, ce qu’il se passe au niveau des valeurs et des “genres”. En toute logique, le macho devient lesbienne, puis féministe, puis gay, puis maman. Avec l’immense Ellen Barkin, tout·es à la fois, la plus inclusive d’entre nous. Camille Nevers
36. Homme au bain de Christophe Honoré (France, 2010). Avec François Sagat, Omar Ben Sellem, Chiara Mastroianni
Homme au bain est plus un film de désamour que l’inverse, tant il est le récit de la double cicatrisation amoureuse que vivent chacun de leur côté deux anciens amants. Quand l’un vit une rupture dissolue, l’autre reconstruit sa vie avec sagesse. Mais plus le film avance, plus Honoré brouille cette ligne de partage entre les effets escomptés ou non de ces deux deuils amoureux opposés. Homme au bain finit alors par dévoiler son vrai sujet, qui est précisément les effets du dévoilement, de la mise à nu d’un corps au moment du rapport sexuel, de la charge sentimentale qu’il porte. Et quel corps, puisqu’il s’agit en l’occurrence de celui du hardeur François Sagat, bouleversante révélation du film. B.D.
35. I Love You Phillip Morris de Glenn Ficarra et John Requa (États-Unis, 2009). Avec Jim Carrey, Ewan McGregor
Qu’y a-t-il derrière le masque de Jim Carrey ? D’autres masques, à l’infini, répondaient (brillamment) John Requa et Glenn Ficarra dans leur premier long-métrage, en 2010. I Love You Phillip Morris figure l’acteur au visage protéiforme en escroc sincère – un personnage qui passe son temps à se faufiler comme une anguille mais trouve dans le mensonge permanent une forme de vérité intérieure. Et surtout de dévouement à l’homme de sa vie, le Philip Morris éponyme (Ewan McGregor, dans l’un de ses rôles les plus émouvants), pour l’amour duquel il est prêt à toutes les contorsions. C’est l’histoire d’un amour finalement démasqué. Jacky Goldberg
34. Go Fish de Rose Troche (États-Unis, 1994). Avec Rose Troche, Guinevere Turner
Il faut attendre la toute fin du premier long métrage en noir et blanc de Rose Troche pour que ses deux héroïnes Ely et Max fassent l’amour après des mois à se tourner autour. Les deux jeunes femmes racontent à leurs amies respectives leur rapport sexuel (qui commence par un coupage d’ongles) ; leurs narrations s’entrecoupent d’un montage rapide de gros plans sur des mains, sur un dos, des langues qui se rencontrent, des cuisses qui s’enchevêtrent. Le générique du film se poursuit en s’entrecoupant à son tour de plans d’autres corps lesbiens s’aimant. Go Fish a réussi à mettre en scène la joie du sexe lesbien et aussi la joie de pouvoir partager ses expériences dans sa communauté. Iris Brey
33. Call Me By Your Name de Luca Guadagnino (États-Unis, Italie, 2017). Avec Timothée Chalamet, Armie Hammer
L’été de ses 17 ans est pour Elio, fils d’intellectuels multilingues séjournant quelques mois en Italie, celui de l’éveil sexuel, qu’il expérimentera avec une amie d’enfance, une pêche bien mûre, ainsi qu’un thésard américain aux manières vulgaires. Si le film est relativement pudique, la séquence qui donne son nom au titre est probablement la plus érotique et dit toute la dimension ludique et romantique de l’amour entre les deux hommes : cette interversion des prénoms, où chacun parle à l’autre comme s’il se parlait à lui-même, incarne la plus douce fusion d’êtres pour qui cet été magique sera le seul. Paul Courbin
32. Passion de Brian De Palma (Allemagne, France, 2012). Avec Rachel McAdams, Noomi Rapace
Passion est un film totalement pervers, l’adaptation officielle d’un film d’Alain Corneau (!), Crime d’amour, lui-même remake caché de L’Invraisemblable Vérité de Fritz Lang. On y perdrait ses petits. Le principe est toujours le même : un individu exécute un meurtre, se fait passer pour le coupable. Mais les preuves de sa culpabilité vont lui servir à se faire innocenter, et vice versa… Le tout à la sauce baroque, crypto-hitchcockienne de De Palma, ici en pleine forme, avec un goût prononcé, manifestement jouissif chez le cinéaste, pour l’ambivalence des signes et la bisexualité des êtres, notamment des femmes. Attention, ce n’est pas un film tiède pour les tièdes. Splendide ! J.-B.M.
31. My Beautiful Laundrette de Stephen Frears (Royaume-Uni, 1985). Avec Daniel Day-Lewis, Richard Graham
Une histoire du racisme et de l’homosexualité sous le gouvernement rigoriste de Thatcher, à travers les retrouvailles entre un jeune Pakistanais rêvant d’ouvrir une laverie et un ancien camarade devenu skinhead d’extrême droite. Lorsque Johnny prend en embuscade le jeune Omar, les deux se reconnaissent et entament une histoire d’amour secrète que leurs milieux respectifs bannissent : le film de Stephen Frears radiographie les conflits qui animent les années 1980 en Angleterre, tout en y incluant un espoir, que la séquence finale sous forme de bataille d’eau amicale entre les deux amants vient concrétiser. P.C.
30. Mysterious Skin de Gregg Araki (États-Unis, 2004). Avec Joseph Gordon-Levitt, Brady Corbet
La question s’est posée de mettre ou pas Mysterious Skin dans ce top, tant l’époque est à la réexamination de la façon dont nous avons romantisé certaines relations en occultant la part de violence et d’abus qu’elles impliquent. Mysterious Skin est à ce titre plus que jamais pertinent car le film parvient à raconter la relation pédocriminelle qui lie deux petits garçons et leur entraîneur de baseball, tout en ne faisant pas l’économie des graves traumatismes qu’elle a suscités chez eux. Le film est aussi une double trajectoire de cicatrisation, d’un côté par le retour du refoulé et de l’autre par la découverte d’un amour exempt de domination. B.D.
29. Lianna de John Sayles (États-Unis, 1983). Avec Linda Griffiths, Jane Hallaren
Lianna (Linda Griffiths), femme mariée et mère de deux enfants, décide de reprendre ses études et tombe amoureuse de sa professeure de psychologie, Ruth (Jane Hallaren). À une époque où les histoires d’amour lesbiennes ont peu leur place sur les écrans, John Sayles balaye toute suspicion du film à sujet fleurant bon le scandale ou l’érotisme libidineux. Le cinéaste américain regarde cette rencontre amoureuse comme une limpide et irrésistible attraction joyeuse et sensuelle sans idéalisme aucun, mais au contraire en se concentrant, aussi, sur l’après et les conséquences (misogynie, sexisme) liées à cette nouvelle vie. Marilou Duponchel
28. Tropical Malady d’Apichatpong Weerasethakul (Thaïlande, 2004). Avec Banlop Lomnoi, Sakda Kaewbuadee
Troisième long métrage de l’auteur palmé d’Oncle Boonmee, celui qui se souvient de ses vies antérieures (2010), Tropical Malady s’organise en deux parties. La première est l’idylle entre un jeune campagnard, Tong, et un jeune militaire, Keng. Chaque plan diffuse un embrun aphrodisiaque, dédié à la félicité amoureuse et à l’état d’apesanteur de ceux qui s’aiment. Le quotidien le plus insignifiant donne lieu à un émerveillement permanent. Après ce rêve que constitue la première partie, la seconde est le cauchemar. Désormais Tong a disparu, un fauve déchaîné déchiquette les animaux domestiques. Keng s’arme et s’enfonce dans la jungle pour traquer le fauve. Qui est peut-être la réincarnation de son amant. Au rythme languissant de la promenade succède celui, tendu et moite, de la chasse. Tropical Malady figure avec une puissance stupéfiante l’amour comme puissance de mutation. L’amour fait muter ceux qui s’aiment. Le soldat devient une proie, le jeune homme candide, un monstre mythologique, l’attirance sexuelle, un désir de dévoration. La maladie tropicale, qui dérègle les organismes et les rend fous, c’est ce sentiment instable, offensif, furieux : l’amour. J.-M.L.
27. Plaire, aimer et courir vite de Christophe Honoré (France, 2018). Avec Vincent Lacoste, Pierre Deladonchamps, Denis Podalydès
Prix Louis Delluc 2018, Plaire, aimer et courir vite est l’un des plus beaux films de Christophe Honoré. Le film se déroule en 1993 et raconte la rencontre d’une étudiant à Rennes (Vincent Lacoste) avec Jacques (Pierre Deladonchamps), un écrivain qui vit à Paris avec son fils. Ils se plaisent, s’aiment. Mais Jacques est séropositif et sait qu’il faut se dépêcher d’aimer avant de mourir. Un film enlevé, sans pathos, souvent drôle, férocement drôle et extrêmement bouleversant. J.-B.M.
26. Les Amours imaginaires de Xavier Dolan (Canada, 2010). Avec Xavier Dolan, Niels Schneider, Monia Chokri
Le second film de Xavier Dolan raconte la façon dont deux amis, Francis (Xavier himself) et Marie (Monia Chokri) vont tous deux tomber amoureux de Nicolas (Niels Schneider), incarnation vivante du bel éphèbe. Les rapports de ce trio devenu inséparable vont passer par l’amitié, l’amour et la frustration dans un torrent émotionnel constant. Dans cette mise en scène incandescente du désir, le jeune cinéaste (il a tout juste 20 ans) mêle sa passion pour ses partenaires de jeu à celle qu’il voue au cinéma en citant quelques maîtres : Jean Cocteau, Gus Van Sant, Gregg Araki ou Wong Kar-wai. B.D.
{"type":"Banniere-Basse"}