Les seigneurs du blues touareg ne quittent visiblement pas les sommets.
Rotations électriques et déflagrations minérales, palpitations brutales et échos circulaires, claquements de lanières, youyous et chœurs d’hommes en soutien, et puis cette sorte de détermination, de volonté, comme un bloc de fierté et de résistance inébranlables, voilà ce que l’estomac reçoit dès les premières secondes de cet album, le huitième de Tinariwen.
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Au fil du temps, on a appris à connaître quelques-unes des tribus qui hantent le Sahel et s’attachent à défendre la dignité tamasheq dans des blues arides aux refrains lancinants. Beaucoup sont remarquables, pourtant les vétérans du riff touareg se détachent toujours, demeurent uniques par la puissance du son, l’invention de motifs, la solidité des attaches. Comme une magie supplémentaire, une transe à laquelle seuls Ibrahim ag Alhabib et les siens savent donner une amplitude aussi âpre et fine, douce et sous-tendue d’un danger permanent comme le sont le sable et le vent dans le désert. Le groupe a certes quitté l’espace qu’il arpentait autrefois en nomade et en rebelle – trop de bandits et de trafiquants le fréquentent aujourd’hui –, mais sa musique n’en a pas souffert.
S’il a été enregistré entre la France, le Maroc et les Etats-Unis, et a pu bénéficier du renfort de Kurt Vile, Mark Lanegan (ex-Queens Of The Stone Age) et Matt Sweeney (producteur et guitariste, compagnon de bourlingue de Johnny Cash, Bonnie “Prince” Billy et Iggy Pop), la plus grande force de ce disque réside dans son arrimage tenace, définitif, à l’esthétique développée par les bluesmen sahariens.
Soit un rythme lent, souple, une respiration profonde comme une pesanteur gracieuse, une majesté que n’aurait pas affectée le passage à l’ère moderne, son cortège de vulgarités mensongères et son exécration de tout ce qui est noble – c’est ainsi que le titre retenu pour ce disque, Elwan, “les éléphants”, prend tout son sens. On a souvent comparé Tinariwen à des princes sans royaume. Ce royaume, ils l’emmènent en réalité partout avec eux pour nous en faire don, concert après concert, album après album. Elwan apporte la preuve de son intégrité et de sa splendeur inentamées.
concerts le 10 mars à Brest, le 17 à Queven, du 18 au 20 à Paris (Maroquinerie), le 24 à Noisiel, le 25 à Beynes et le 26 à Calais.
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