The Art of the Afghan Rubâb

Voilà qui se veut moins une chronique qu’une alerte rouge. Imaginez qu’au-dessus de vos têtes clignote un Attention géant !? Serait-ce convaincant ? Au moins, si Homayun Sakhi pouvait se produire à l’affiche d’un festival comme Monterey 67, quand la musique de Ravi Shankar entra sans crier gare dans l’orbite d’écoute du public rock venu pour Hendrix et les Who En ces temps de sévère compartimentation, on peut toujours rêver. L’ironie, c’est que Homayun Sakhi vit à quelques kilomètres de Monterey, dans une ville de la Californie du Nord, Fremont, où se concentre la plus forte communauté afghane des Etats-Unis.

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Son parcours personnel témoigne des convulsions que connaît son pays depuis un quart de siècle. Né à Kaboul en 1976, trois ans avant l’invasion soviétique, exilé à Peshawar, au Pakistan, en 1992 à l’arrivée des Talibans, il a finalement rejoint la Californie en 2001, d’où il mène sa carrière et dispense ses cours de luth rubâb. En son temps, Shankar avait dérivé entre l’Inde, l’Europe et l’Amérique. De fait, ce qui jumelle vraiment les deux hommes, c’est cette manière d’insuffler le mouvement à un répertoire sédentaire. Depuis la fin du XIXe siècle, la musique classique afghane partage les mêmes canons que ceux de l’Inde du Nord. Le raga règne en maître et les tablas y enroulent leurs cycles rythmiques comme les anneaux d’un serpent. Seule différence, le rubâb, luth à double chambre, remplace sitar et sarod. Ici, l’esprit pyromane de Shankar, qui de chaque raga fait un bûcher crépitant, se retrouve comme transmigré dans l’âme de Sakhi. Son Raga Madhuvanti vous réduit en cendres d’hébétude admirative. Ce type est à découvrir sans plus tarder.