Douze mois après un premier album éruptif, le septuor anglais revient jouer avec le soufre et lâche une nouvelle bombe à combustion lente.
Certains détails ne trompent pas. Et voir Isaac Wood, chanteur, guitariste et parolier de Black Country, New Road, saisir une guitare acoustique avant de débouler sur la scène du Trabendo à l’automne dernier en est un.
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Prenant de court l’auditoire, dont une majeure partie s’était sans doute déplacée pour revivre en direct les déflagrations tirées de l’incendiaire For the First Time (2021), la troupe originaire de Cambridge a préféré aligner ses nouvelles trouvailles pour révéler sa métamorphose. Exit le spoken word, les riffs en puissance et la folie sans retenue aux frontières de la transe. Place aux chants et refrains assumés, aux arrangements raffinés et à davantage de subtilité.
Si Black Country, New Road pensait nous la faire à l’envers, autant prendre Ants from Up There à rebours, second LP élaboré en plein confinement et dont l’arrivée précipitée coïncide presque jour pour jour avec le premier anniversaire de son prédécesseur. Ultime morceau à figurer sur la setlist de leur date parisienne, mais surtout conclusion sublime de ce nouveau long, Basketball Shoes s’impose comme la pièce maîtresse d’une discographie pleine de promesses et dont le morceau semble offrir la parfaite synthèse, autant qu’il assure à ses musiciens leur plus juste représentation.
“C’est une chanson fondamentale, observe la bassiste Tyler Hyde le lendemain du concert. Elle développe un certain motif, quelque chose de spécifique, que l’on peut retrouver tout au long du disque. Elle pose les bases et sonne finalement comme un medley de l’album. Tout y est concentré.”
À l’image de cette épopée fantastique étirée sur plus de douze minutes, que Black Country, New Road peaufine sur scène depuis 2019, Ants from Up There distille une mélancolie à l’intensité certaine qui se consume pourtant à petit feu sur chacune des pistes. Tout est alors une question de dynamique, de jeux de rupture et de frustrations volontaires, de silences et de crescendos destinés à provoquer l’excitation et la perte de contrôle jusqu’à l’embrasement tant attendu.
Construit autour d’une instrumentation polymorphe où piano, guitares, cordes et cuivres se veulent aussi délicats que fracassants (Concorde, Haldern, Snow Globes), de boucles épurées, de breaks de batterie toujours aussi vigoureux et de paroles aux allures de complaintes romantiques délivrées par un Isaac Wood constamment sur la brèche, l’ensemble se pose en rupture avec l’instantanéité de For the First Time.
“Un cheminement naturel”
“Avec le deuxième album, nous voulions créer quelque chose qui soit musicalement cohérent et complet, à la différence du premier”, observe le batteur Charlie Wayne. Tyler Hyde ajoute : “C’est un cheminement naturel. Ce disque nous révèle tels que nous sommes.”
Si le septuor continue de mélanger les influences klezmer et postrock de ses récents débuts, il s’inspire désormais de la musique minimaliste et semble prêt à atteindre les sommets en piochant davantage dans l’indie folk américaine et chez ses compatriotes Pulp, The Divine Comedy (le single Chaos Space Marine) ou encore Radiohead (l’immense Bread Song). Nul doute que les formes visibles en contrebas risquent de finir par ressembler à des fourmis. Ce n’est peut-être qu’un détail.
Ants From Up There (Ninja Tune/PIAS). Sortie le 4 février.
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