Une jeune femme contemple un tableau dans un musée vénitien, puis elle poursuit sa marche solitaire et surprend au détour d’une salle un homme en train de dérober une toile. C’est sur ce premier songe de l’héroïne que s’ouvre le film, première brèche dans son univers nocturne qui va déclencher toute une série de rêves […]
Une jeune femme contemple un tableau dans un musée vénitien, puis elle poursuit sa marche solitaire et surprend au détour d’une salle un homme en train de dérober une toile. C’est sur ce premier songe de l’héroïne que s’ouvre le film, première brèche dans son univers nocturne qui va déclencher toute une série de rêves se suivant jusqu’à former une histoire parallèle à sa vie. Anna Oz vient de passer de l’autre côté du miroir et un double onirique vient de prendre corps. Cette seconde Anna, qui n’existe que dans son imagination, est étudiante et séjourne à Venise. Mais elle va si fortement s’incarner dans son esprit que cette chimère va acquérir une existence propre et indépendante, au point de vouloir l’assassiner pour devenir l’originale. Plus les nuits vont se succéder, plus cette duplicité fantasmée va s’accentuer et son identité sombrer sous l’emprise de ce vampire mental.
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Cette idée de départ était séduisante, mais fonctionne mal à l’écran. En optant pour une symétrie visuelle totale entre la vie quotidienne et le rêve, Rochant déroule les deux narrations sur le même plan, aplatissant l’ensemble et enlevant au spectateur ce sentiment d’effraction qu’il devrait ressentir en pénétrant les songes d’Anna. D’autre part, l’héroïne et son double ne se démarquent pas assez l’une de l’autre pour réussir à prendre un envol dramatique. Le potentiel suggestif de Venise est également mal utilisé : le caractère mystérieux et labyrinthique de la ville est trop peu présent, les personnages sont cantonnés en des lieux clos du début à la fin, et Rochant fige les décors et les corps dans une sophistication qui maintient le film dans l’artificiel. De même pour l’eau, élément omniprésent sous diverses formes (canaux, vapeur, bande-son aux sonorités liquides), qui glisse dans nos subconscients sans marquer son passage.
Tous les composants du film restent ainsi infertiles, n’attaquent pas la surface lisse qui le recouvre, si bien que le spectateur ne se sent jamais en alerte ; il se laisse porter dans un roulis, rendu agréable par la présence de Charlotte Gainsbourg (sous-utilisée ces temps-ci par le cinéma français) et de Sami Bouajila (déjà remarquable dans Bye-bye), mais vain et nébuleux. On reste au seuil du film, dans ce sentiment de confusion qui domine la vision d’Anna Oz, ne sachant quelle clé de l’histoire choisir entre toutes celles que Rochant distribue, comme autant d’éléments qui s’amoncellent horizontalement sans jamais s’assembler.
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