A paraître dans les prochains jours, le deuxième album de The Do est l’oeuvre fascinante d’un duo radicalement libre : Olivia et Dan définissent leur philosophie du risque dans une longue et passionnante interview.
Comment vous sentez-vous une semaine de la sortie de l’album?
Olivia : On a hâte!
Vous avez eu des retours déjà?
Dan : On a des retours. Mais je ne devrais pas vous dire ça. Pour pas que ça ne vous influence. (rires) On a des très bons retours donc on est très contents. Mais on a compris que ce n’était pas non plus forcément un album grand public…
Olivia : Le premier non plus n’était pas un album grand public, dans notre idée… Après c’est le public qui décide.
Dan : Ca reste une musique qui s’écoute… Il y a tellement de musique aujourd’hui qui ne s’écoute pas, mais qui s’entend. Ce n’est pas de la musique que tu mets quand tu reçois des invités.
Olivia : Ce n’est pas de la musique d’ambiance.
Est-ce que vous appréhendez les retombées… la tournée, la promo, le voyage…
Dan : Non, c’est cool que ça recommence. On est content de remonter sur scène, vraiment. On a fait quatre concerts déjà. On a un nouveau groupe, des nouveaux musiciens, on est dix sur scène, et le deuxième album est très compliqué à jouer. Mais en même temps c’est un challenge à chaque morceau : pour la première date, je n’ai jamais eu un trac pareil, je tremblais sur scène jusqu’au rappel. C’était dingue. Ca s’est arrangé ensuite. Mais c’est un album qui fait que… il y a toujours un truc en plus, et puis un autre truc, et un autre truc encore, et ce jusqu’à la fin.
Et c’est un tract technique ou par rapport à la réaction du public ?
Dan : Les deux, je pense. L’album n’est pas sorti, alors les gens sont très attentifs. Mais en même temps ils en redemandaient…
Olivia : Moi j’étais complètement à l’inverse ce jour-là.
Dan : Oui, ce jour-là. Mais après t’as commencé à flipper!
Olivia : Ouais j’avais le trac sur la dernière date! Tout à l’envers.
Vous avez enchaîné assez vite entre la fin du dernier et l’enregistrement du deuxième album. Vous n’avez pas eu envie de vous déconnecter un peu, de vous poser, de prendre un peu de distance? Ou au contraire est-ce que vous en avez eu le temps?
Olivia : Peut-être. Mais on était impatients, vraiment. La tournée nous a… On avait vraiment envie de se retrouver à deux, on avait déjà pas mal de chansons, j’avais pas mal composé pendant la tournée, on avait même commencé à enregistrer quelques trucs, dès qu’on avait quelques jours. Mais il y a un moment, quand on est sur la route… On est tellement entourés, on est tellement assistés, on est tout le temps publiques, exposés… On avait vraiment envie de s’isoler et de se recentrer.
Et il y a un moment où la tournée s’est transformée en contrainte? Même si c’était très excitant au début…
Olivia : Il y a eu beaucoup de territoires, donc à chaque fois un accueil différent et un défi nouveau. Ca permet de conserver une certaine fraîcheur. Mais après avoir joué les morceaux à trois, on avait vraiment envie de plus de richesse et de plus de. C’était vraiment génial, au début, d’avoir ce défi de jouer à trois, de synthétiser au maximum. Et ça nous permettait aussi de les changer à notre guise autant qu’on voulait. Mais je pense que passé un moment, on s’est un peu installés dans certaines versions des morceaux, et on ne pouvait pas vraiment aller plus loin dans ce processus d’adaptation parce que là le public n’aurait vraiment rien compris…
À quoi vous vous attendez pour le Both Ways Open Jaws ?
Dan : À rien du tout!
Olivia : Non, franchement pas à grand chose. Surtout qu’on a l’expérience de la surprise. Sur Myspace, au tout début, avant la sortie d’A Mouthful, des gens s’intéressaient à nous, et on pensait qu’on resterait un petit groupe indé… On a ensuite vu les labels, mais tout le monde nous disait « Vous ne voulez pas chanter en français ? Vous ne pouvez pas ne pas chanter en Français ! » Donc on ne s’est pas non plus fait trop de plans… On a été les premiers surpris. Et ça a ensuite été un enchaînement d’expériences intenses, nouvelles.
Toujours un peu plus grand, toujours un peu plus magique, toujours un peu plus surréaliste ?
Dan : De toute façon depuis le début, depuis les Transmusicales, même avant, c’était un peu étrange. On a fait trois fois la Flèche d’or, il y avait 200 mètre de queue dehors : c’était déjà n’importe quoi, complètement surréaliste. C’était surréaliste aussi de faire la première page de Ouest France après ce concert aux Trans, quelque chose comme « Le concert de la soirée ». Alors qu’on se sentait nuls, mais nuls ! Heureusement, des gens, plus tard, nous on on confirmé notre impression : c’est vrai qu’on était des cacahuètes, on le savait, on n’a jamais dit qu’on a été des bêtes de scène. En revanche, on n’avait peur de rien à cette époque. On disait « Je veux un truc avec des casseroles autour du batteur! Et cinq claviers! » Et les gens nous répondaient « Non mais tu ne peux pas, c’est impossible ! » Aujourd’hui, on se rend compte que c’est plus compliqué que ça, la scène… Mais tout a été magique : les prix qu’on a eus, les nominations, les tournées en Australie, en Turquie où c’était blindé, à Mexico où c’était blindé, aux Etats-Unis, au Canada. On se dit que c’est incroyable ce qu’on vit.
Il n’y a pas un moment où on se demande si c’est mérité ou s’il n’y a pas un peu d’imposture ?
Olivia : Au début, pour la scène, on a bossé comme des tarés, tout le monde nous demandait pourquoi on répétait autant, on répétait tout le temps, on n’a pas arrêté de répéter pendant toute la tournée. C’est sûr qu’il fallait qu’on le mérite, tout ça! L’album on en était fiers, c’était abouti, on assumait totalement. Après sur scène c’était une autre paire de manches.
Dan : On avait acheté la guitare électrique d’Olivia à peu près deux mois avant le premier concert, c’était n’importe quoi.
Olivia : Oui, comme pour moi le fait de jouer et de chanter en même temps… Il fallait que j’aie deux cerveaux d’un coup alors que je n’en avais qu’un…
Dan : Au premier concert je ne savais même pas ce qu’était un retour, on me demandait de régler mon ampli basse et moi je regardais et je disais « Mais je n’en ai pas besoin, je m’en fous ! » Et on faisait des trucs trop drôles! Je ne savais rien, c’était nul!
Olivia : Je crois qu’il y avait ce charme des gens qui ne comprennent rien.
Dan : Je crois qu’on était plus punk que les gens ne voulaient le croire, on s’en foutait vraiment. Mais après, on a réécouté des concerts et on s’est rendus compte des choses qu’on devait changer. Les ingénieurs du son me disaient qu’il fallait mettre la basse avec la grosse caisse, et moi je disais « Ah bon? ». Il n’y a pas de basse-batterie ans le premier album. On n’a jamais mis un micro dans la grosse caisse. C’est pour ça que dans le deuxième album il y a plus de bas aussi : on a appris tout ça.
Olivia : C’est le live qui nous a appris ça.
Dan : On est tellement contents de ce deuxième album… On s’est dit qu’on a pu le faire alors que les gens nous avaient dit que peut-être que ça allait s’arrêter à un seul album. On s’étonne.
Vous avez eu peur que l’inspiration retombe?
Dan : Ah non l’inspiration jamais. On a tellement de choses à dire! Même Olivia voulait qu’on enchaîne un troisième album derrière le deuxième. On a beaucoup de choses à dire. On aime ça, on aime les défis. Là, par exemple, le challenge est de faire des concerts avec un nouveau groupe, avec une nouvelle équipe. Ça aussi c’est un risque.