C’est faute de pouvoir commencer le tournage de Quo vadis à l’heure prévue - Gregory Peck avait des problèmes oculaires - que John Huston choisit d’adapter à l’écran The Asphalt jungle (Quand la ville dort) de W. R. Burnett. Quand la ville dort décrit un univers pourri jusqu’à la moelle où tout se déroule de […]
C’est faute de pouvoir commencer le tournage de Quo vadis à l’heure prévue - Gregory Peck avait des problèmes oculaires - que John Huston choisit d’adapter à l’écran The Asphalt jungle (Quand la ville dort) de W. R. Burnett. Quand la ville dort décrit un univers pourri jusqu’à la moelle où tout se déroule de manière immuable, au moins jusqu’au cambriolage de la bijouterie, tel un rituel répété mille fois : Cobby le bookmaker, à qui l’argent semble rendre les mains moites, refile un bakchich à un flic pour qu’il ferme les yeux. Alonzo Emmerich, l’avocat marron, vit avec une femme handicapée et se tape une pépée (Marilyn Monroe) derrière son dos. Dix Handley (Sterling Hayden) parvient toujours à échapper aux soupçons que la police fait peser sur lui et Gus Minissi, le barman amateur de chats, cache tranquillement l’arme du crime. Tout ce beau monde n’a plus qu’à laisser le temps passer avant de mettre la main sur le magot dont ils ont toujours rêvé et de mettre les voiles. Ce butin de la bijouterie Belletier est similaire à la figurine en toc du Faucon maltais, à l’or du Trésor de la Sierra Madre, à la baleine blanche de Moby Dick, au titre de champion du monde après lequel court Stacy Keach dans Fat city : un Eldorado fantasmatique qui se dérobe sous les pieds des personnages à chaque fois qu’ils pensent enfin mettre la main dessus. « Ma chance doit tourner », disait Dix à sa compagne. Quand la ville dort est un chapitre supplémentaire à ajouter à une œuvre presque tout entière consacrée à l’échec. « Les metteurs en scène, déclarait Huston, font toujours une erreur énorme. Ils donnent une importance primordiale au hold-up, au crime, et oublient les personnages. Dans mon film, le hold-up était secondaire. Les motivations du hold-up étaient beaucoup plus importantes. Beaucoup de gens ont trouvé ce film immoral, parce qu’on était forcé de sympathiser avec les criminels. Ils se sentaient criminels de comprendre l’état d’esprit des criminels. » Dans ce portrait de losers surnagent Sterling Hayden (que Huston engage malgré l’avis de la MGM), Marilyn Monroe dans le premier rôle où elle a des répliques, et Louis Calhern, l’avocat qui fond devant elle.
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