Durant ces années où l’URSS a volé en éclats, Mikhalkov ne s’est pas contenté de réaliser une poignée de films qui lui ont valu une reconnaissance internationale (Urga ou le surfait Soleil trompeur). Avec des bouts de pellicule, sans plan de travail, Mikhalkov a filmé sa fille aînée Anna en lui posant, chaque nouvelle année, […]
Durant ces années où l’URSS a volé en éclats, Mikhalkov ne s’est pas contenté de réaliser une poignée de films qui lui ont valu une reconnaissance internationale (Urga ou le surfait Soleil trompeur). Avec des bouts de pellicule, sans plan de travail, Mikhalkov a filmé sa fille aînée Anna en lui posant, chaque nouvelle année, les mêmes questions : « Qu’est-ce qui t’effraie le plus ? », » Quel est ton plus fort désir ? », « Que détestes-tu plus que tout ? », « Qu’est-ce que tu aimes par-dessus tout ? », « Qu’attends-tu de la vie ? » Interrogations existentielles qui ouvrent des perspectives infinies et auxquelles la gamine est contrainte de répondre. Avec les inévitables variantes induites par l’âge, l’état d’esprit du moment, les événements politiques et l’intensité de la pression psychologique exercée par son paternel, genre « regarde-moi dans les yeux quand je te parle ma fille ». Quelque part entre leçon de morale intimidante et reality show consacré aux rapports père-fille, Anna est un film inquiétant à bien des égards. Mikhalkov y rêve tout haut d’une Grande Russie, concept assez flou pour que l’on frémisse à son évocation. Selon lui, le bordel ambiant de la Russie est aussi celui d’un monde qui sombrerait dans le chaos à cause de l’absence de Dieu. Il en observe les symptômes aussi bien dans la ferveur islamique (le Dieu des autres, on le sait, n’est pas vraiment Dieu) que dans les défilés de mode français où les frontières sexuelles s’effilochent et où l’on joue au méli-mélo identitaire. A partir de là, ce qu’il pourrait y avoir d’intéressant dans Anna la correspondance entre documentaire introspectif et fiction de l’histoire en train de se faire se réduit à un moralisme vengeur et binaire, pendant slave du retour à l’ordre moral ayant cours aux Etats-Unis. L’internationale du frisson.
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