Réalisation impeccable mais impersonnelle, Apollo 13 est une ode spectaculaire dédiée à l’Amérique.
« Allô, Houston ! Rien ne va plus ! Les convertisseurs XB 12 ne fonctionnent plus ! » « Apollo ? Ici, Houston. On va s’en sortir. Recharger les obturateurs H2O, fermer les valves des XZ 38 et n’oubliez pas la clé de 20 ! » Avec Apollo 13, Ron Howard réussit l’exploit sémantique de tenir en haleine le public avec des dialogues dont seuls les mécanos de la Nasa saisiront toute la teneur poétique. Cette nouvelle superproduction spatiale relate par le détail l’aventure de la mission Apollo qui avait failli capoter suite à une défection des réservoirs à oxygène les plus anciens s’en souviennent peut-être, l’Amérique entière était suspendue à son poste pour suivre le périlleux retour de la capsule sur Terre. Les astronautes ayant finalement réussi à revenir sains et saufs, Apollo 13 se transforma en l’une de ces gigantesques catharsis collectives qui permettent régulièrement à l’Amérique de se ressouder autour de sa certitude d’être la plus grande nation du monde. Toujours prête à refouler la notion d’échec, l’Amérique, par la voix de la Nasa, parla de « successfull failure ». C’est ce ratage transformé en réussite éclatante, sujet idéal pour une superproduction, que s’attache à filmer Ron Howard. Archicompétent techniquement, mais dépourvu du moindre gramme de personnalité, Apollo 13 est bien à l’image de Ron Howard, pur produit gentil et ennuyeux des banlieues Wasp. L’aspect technologique du film est irréprochable : l’entraînement des astronautes, le décollage de la fusée, la vie quotidienne à bord du vaisseau, les petits gags liés au phénomène de l’apesanteur tout cela est filmé avec un réalisme scrupuleux, quasi documentaire. Simplement, il faut aussi se farcir tout le sirop idéologique habituel sur le courage des p’tits gars, la solidarité de la nation menacée, l’émotion d’une mère et d’un gosse quand papa Tom Hanks est en danger de mort, les couilles en béton de l’Amérique quand elle passe à l’action bref, même si Ron Howard nous disait benoîtement qu’il s’agit juste d’entertainment, Apollo 13 ressemble furieusement à une grande pub pour la nation américaine, diffusée sur tous les écrans du monde. Le commandant de la base de Houston est interprété par Ed Harris, clin d’œil à L’Etoffe des héros. Sauf que le lyrisme et la dimension poétique que Philip Kaufman avait su insuffler à son film sont totalement absents d’Apollo 13. Ron Howard propose avec beaucoup de savoir-faire ce mélange froidement calculé d’ingrédients propres à rameuter le grand public ; loin d’être dans la lune, les créateurs d’Apollo 13 sont on ne peut plus terre à terre.
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