Pour fêter l’arrivée de la saison 2, le 13 octobre prochain, la première est disponible gratuitement (et sans abonnement) sur Prime Video.
Loin des documentaires promotionnels pompeux et vides de sens, “Montre jamais ça à personne” est une authentique plongée dans la construction du succès du rappeur “perdu d’avance”.
“Par contre j’te préviens tout de suite, mais montre jamais ça à personne”. Plus qu’un gimmick drôlement ironique, cette phrase, qui clôture le générique de chacun des six épisodes du documentaire de Clément Cotentin sur son frère Aurélien Cotentin alias Orelsan, est un véritable leitmotiv pour conjurer la loose des débuts dans le rap à la lumière du succès présent. Avant de se jeter sur le nouvel album d’Orelsan promis au bout des 4h30 de visionnage, Montre jamais ça à personne est le manifeste d’un petit frère acharné vouant une confiance aveugle dans la réussite de son aîné. À raison.
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C’est là toute la force de ce documentaire et de ses 3000 heures de rushs captés sur deux décennies et ramassés en six épisodes : tout sonne juste, car tout est vrai. S’il est entrecoupé d’entretiens ou use d’effets de montage directement issu de l’école YouTube ou Bref (Kyan Khojandi et Navo font partie des invités), Montre jamais ça à personne n’essaye jamais de se donner un genre à l’instar des pontifiants – ou lénifiants – documentaires à usage promotionnel que sont Les Étoiles vagabondes de Nekfeu et autres films douloureusement artificiels.
Buddy movie
Malgré son indéfectible croyance en la réussite de son frère, Clément Cotentin n’épargne donc rien de la carrière d’Orelsan. De la polémique à rallonge qui a entouré le morceau Sale Pute, à l’humiliation du concours de clash Unküt sous les yeux de Booba, en passant par son bullshit job de veilleur de nuit ou son faux départ à la Boule Noire, tout y passe et tout se voit de l’intérieur. Avec son allure de work in progress permanent, Montre jamais ça à personne raconte aussi l’itinéraire de cameraman amateur à celui de journaliste et réalisateur accompli.
Sa narration chronologique capture le moment où l’idée d’une carrière a germé et son déploiement, sa réalisation : Comment Orelsan est passé de rappeur de périphérie à superstar remplissant Bercy ? La réponse se trouve certainement dans la galerie de personnages admirablement mis en scène et croqués dans les archives de Clément Cotentin : Skread, le producteur-stratège, Ablaye, backeur et indéfectible soutien des délires d’Orelsan, et Gringe, branleur invétéré et rappeur charismatique. En montrant l’équipe qui ne l’a jamais vraiment quitté sur les deux décennies de sa carrière, Montre jamais ça à personne décline Orelsan et ses acolytes en une version franchouillarde du Frat Pack de Judd Apatow (Will Ferrell, Steve Carell, etc.). Un espace de créativité où tout est permis et une énergie d’adulescents condamnés à grandir.
Success story
Loin de l’expérience misérabiliste transformée en success story, Montre jamais ça à personne laisse donc à voir quelques moments franchement hilarants qui entérine l’image de loser magnifique d’Orelsan : les interventions de Laurent Bouneau, directeur général des programmes de Skyrock, le running-gag autour des absences de Gringe, les interventions promo catastrophiques de ce dernier, les recales de Booba, les séances de street-golf, ou l’épiphanie Casseurs Flowters.
Toujours animé par le désir de raconter leur trajectoire avec une fidélité qui frise l’impudeur, ce documentaire qui prend son temps pour nouer grande et petites histoires a quelque chose de précieux. Pour qui suivrait l’ascension du Caennais depuis l’apparition de ses premiers freestyles sur MySpace ou son premier album, le bien-nommé Perdu d’avance, il y a un plaisir nostalgique certain à mettre la main sur ces trésors d’archives. Sans ériger un contre-modèle à l’alternance Paris-Marseille dans l’histoire du rap – Caen n’est pas devenu une ville de rap pour autant -, Montre jamais ça à personne se pose comme un manifeste d’amour fraternel et d’abnégation : pourquoi continuer à faire de la musique quand tout semble condamné ? Pourquoi continuer à filmer quand faire de la musique semble impossible ? Parce qu’il y en a toujours un pour y croire.
Montre jamais ça à personne, disponible en exclusivité sur Amazon Prime Video.
Le trailer de la saison 2 :
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