Le chorégraphe offre un second tome à son journal intime, où l’espoir se raconte tout en virtuosité.
Retour vers le futur. À l’époque, en 2001, on s’était dit qu’Hamid Ben Mahi avait l’avenir devant lui. On découvrait alors un formidable interprète et conteur avec Chronic(s). Passé par le Conservatoire de Bordeaux, Ben Mahi brassait danses urbaines et contemporaines. Il avait même osé le classique, le temps d’un passage à l’École de Rosella Hightower. Une vie de danse bien remplie.
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Avec la complicité de Michel Schweizer, le soliste va alors mettre en scène son journal intime. Enfin, façon de parler. Du genre caustique avec des souvenirs tels que son apprentissage, seul garçon issu de la diversité au milieu de jeunes filles en tutu blanc. Chronic(s) fera un tabac. Les tournées s’enchaînent. Hors série, sa compagnie, est propulsée. On a suivi, parfois de loin, sa trajectoire.
Danses de mariage, de résistance, de transe
Vingt ans après, Chronic(s) 2 vient nous rappeler à son bon souvenir. Il prévient tout de suite l’assistance qu’il ne fera pas de tours sur la tête. Il parle – toujours aidé en coulisse de Schweizer – des années d’après, de ses envies de transmission, de sa place dans un monde professionnel. On lui a servi du “Farid”, parce que c’est bien connu, tous ces prénoms arabes se ressemblent. On l’a programmé faute de mieux.
Le tableau n’est pas réjouissant, mais Hamid n’en prend pas – trop – ombrage. Il dit, à sa manière, le peu d’intérêt porté aux danses urbaines dans certains lieux, même si le genre remplit les salles. Hamid Ben Mahi évoque également sa famille où “tout le monde dansait dans le salon”. Alors, il a étudié les danses de mariage, de résistance, de transe. “À quoi sert une tradition ?”, se demande l’interprète. À rester vivant, qui sait.
Sa mère lui conseille de donner du “bismillah” (“au nom de Dieu”) à tous les vents. Sur le plateau, Ben Mahi fait brûler de l’encens et s’offre une chorégraphie enchantée. Il n’a pas abandonné la danse loin, de là ! Il a gardé cette facilité dans la virtuosité, le travail des bras sinueux, la présence imposante.
Un écran, une table, un micro
Chronic(s) 2 est ourlé d’amertume plus que de nostalgie. Pourtant, Hamid Ben Mahi a choisi l’espoir. Dans le dialogue avec ses fils ou ses élèves. Reprendre le fil de ses pérégrinations, deux décennies plus tard, n’est pas sans risque. Une autre génération de solistes a dynamité le hip-hop. Mais Chronic(s) 2 tient la barre.
Le dispositif reste simple : un écran, une table, un micro. Ben Mahi est au centre de tout, mais cherche le pas de côté. Une commande pour le Ballet de Lorraine, une autre pour l’Opéra de Bordeaux, la pièce chorégraphique Apache d’après les chansons d’Alain Bashung, le gars peut être fier. À la fin de Chronic(s) 2, donné au festival Le Temps d’aimer la danse à Biarritz en septembre dernier, Hamid Ben Mahi laisse la “porte” ouverte. Façon de nous donner rendez-vous en 2041, qui sait.
Chronic(s) 2 direction artistique, conception, chorégraphie et mise en scène Hamid Ben Mahi. Dans le cadre du Festival Kalypso, le 20 novembre, Théâtre Louis-Aragon, Tremblay-en-France ; les 23 et 24 novembre, Scène nationale Carré-Colonnes, Blanquefort ; les 3 et 4 mars 2022, La Passerelle, Gap ; le 26 mars 2022, L’Avant-Scène, Cognac.
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