Le premier jeu du studio californien nous entraîne dans un univers enchanteur sous la double influence de Miyazaki et de “Zelda”.
Parmi les compétences requises pour pratiquer correctement et apprécier le jeu vidéo, il en est une – pourtant capitale depuis que les aventures en monde ouvert ont pris l’ascendant sur les parcours plus linéaires – que l’on évoque rarement : le sens de l’orientation. Ses dysfonctionnements peuvent se révéler aussi pénalisants que des réflexes défaillants.
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Sous un ciel d’un bleu éclatant, une vaste forêt aux multiples chemins et embranchements s’offre à nous qui ne demandons qu’à partir en exploration. Et pourtant, une angoisse, d’abord diffuse, ne tarde pas à monter. Où est-ce qu’il faut aller ? C’est bien par là ? Et si je ne trouvais jamais le bon chemin ? Oh non, je suis encore revenu·e sur mes pas…
Esprits de la forêt
Conçu par le petit studio californien Ember Lab spécialisé jusqu’ici dans les images de synthèse, Kena : Bridge of Spirits est un jeu superbe en tous points. Une aventure émouvante dans un univers vibrant dont le rapport à la nature n’est pas sans évoquer le cinéma d’Hayao Miyazaki. Et pas seulement parce que les Rots, adorables petits esprits de la forêt qui rejoignent un par un notre héroïne pour l’assister dans sa quête, rappellent bien d’autres créatures rencontrées chez l’auteur de Mon voisin Totoro (1988). Sous l’influence assez nette de Zelda mais avec une approche et un style bien à lui, le jeu nous envoie restaurer l’harmonie sur des terres malades où sont restées coincées des âmes qui ne demandent qu’à être libérées. Pour cela, il faudra faire bon usage des capacités (qui s’accroissent au fil du temps) et des outils à notre disposition : notre troupe de Rots (qui se jettent sur les monstres ou déplacent des objets), un arc avec ses flèches… Et puis se battre, assez souvent mais sans que ces affrontements ne deviennent trop envahissants.
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Une école du regard
Avant toute chose, Kena est une école du regard : l’enjeu y est moins le “faire” (même dans les phases d’escalade ou de combat) que la compréhension de ce qui peut et doit être accompli. Cela vaut pour les énigmes tournant autour des sanctuaires à purifier comme pour la traversée de son univers. Avec son level design inventif et sa manière aussi fine que touchante d’inscrire dans ses paysages même ce qui agite son récit, le jeu transcende les conventions d’un genre qu’il ne cherche pourtant jamais à bousculer. L’expérience est délicieuse.
À condition, donc, de ne pas s’enfoncer soi-même la tête sous l’eau, entre la crainte de ne pas trouver son chemin (et d’errer des heures durant, perdu·e dans les bois de Kena comme dans des vrais) et celle de passer à côté d’éléments facultatifs et néanmoins précieux. À condition, aussi, de s’abandonner au jeu, d’accepter sa philosophie et son tempo. C’est une promenade. Rien n’oblige à se presser, à tout faire, tout voir, tout épuiser. Et si, en plus d’être fantastique, Kena : Bridge of Spirits avait des vertus thérapeutiques ?
Kena : Bridge of Spirits (Ember Lab), sur PS4, PS5 et Windows, environ 40 €
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