A quelques jours des fêtes, la grande tendance qui s’impose définitivement : le cadeau. Qu’offrir ? Et que recevoir ? Un livre, toujours plus chic qu’une Rolex en or.
Il y a toujours quelque chose de vaguement angoissant à feuilleter les suppléments cadeaux des magazines : comme si l’on avait besoin des conseils d’une personne inconnue de nos services pour nous indiquer comment combler nos intimes – comme si, au fond, nous ne les connaissions jamais vraiment, nos intimes, ou pire, comme s’ils avaient les goûts de tout le monde.
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Monsieur, par exemple, apprendra qu’il se doit d’offrir une paire d’escarpins à paillettes or à sa compagne ; elle, une écharpe en cachemire pour lui. Vous aurez aussi la possibilité de distribuer bougies parfumées, iPhone dernier cri, iPad, macarons chataigne-matcha, autant d’objets luxueux, formatés, voire anonymes.
Or, en ces temps de crise, de froid, d’incertitude et de stress, tous ces cadeaux prennent des allures vaguement vulgaires. Pourquoi pas une Rolex en or, pendant qu’on y est ? Vade retro… Alors, que faire ? Eviter de voir sa grand-mère ? Prendre le risque de se faire plaquer ? Faire pleurer ses chères têtes blondes ?
Il existe pourtant une solution, et cette solution s’appelle le livre. Pour certains encore, hélas, ce mot a quelque chose de désuet. Et pourtant… Oubliez objets de luxe à logos, trop surfaits ; matériel électronique hors de prix, trop banal ; bougies et sucreries, trop anonymes.
Nettement moins cher, voire même franchement abordable, donc moins obscène, le livre est le cadeau personnalisé, avec supplément d’âme, qu’il vous faut. L’offrir flattera en plus son destinataire, constatant avec une certaine fierté que vous pariez sur son intelligence.
D’autant que cette année, pas besoin de se triturer les méninges pour savoir quel livre offrir : on peut se jeter sans risques sur les romans portant la bannière « Prix machin », car rarement les prix auront autant récompensé des oeuvres vraiment littéraires.
On offrira donc à foison La Carte et le Territoire de Michel Houellebecq, La vie est brève et le désir sans fin de Patrick Lapeyre, Naissance d’un pont de Maylis de Kerangal ou Purge de Sofi Oksanen. A ceux qui vous disent attendre qu’un livre sorte en poche pour le lire (il y en a toujours), vous ferez la joie d’écourter l’agonie en leur offrant Suite(s) impériale(s) de Bret Easton Ellis.
Pour un grand-père, l’idéal serait le nouvel Henning Mankell, qui, en plus de mettre en scène un retraité menant l’enquête, nous replonge en pleine guerre froide. A un quinquagénaire bourré de tocs, pourquoi pas le Ken Follett de saison ? Ça l’éloignera un bon moment de ses obsessions.
Au cousin nerd qui a tout lu, le génial London Orbital de Iain Sinclair. Aux jeunes ados en phase de rébellion, les vies très rock de Patti Smith (Just Kids) et de Keith Richards (Life).
A une jolie fille qui en a marre du regard des garçons, le drolatique premier roman de Pauline Klein, Alice Kahn. Aux amoureux de Londres et de littérature anglaise, Le Livre de Dave de Will Self, et aux dandys anglophiles, Le Manifeste chap de Gustav Temple et Vic Darkwood.
A un lecteur de polars qui ne l’aurait pas encore découvert, le Vendetta de R. J. Ellory, qui sort justement en poche. Et plutôt qu’un bijou, on offrira ce beau livre autour de la créatrice de bijoux Lina Baretti, Parures, écrit et publié par Patrick Mauriès. En plus d’avoir travaillé pour Dior ou Schiaparelli, d’avoir été l’une des égéries de la café society d’après-guerre, Lina Barretti fut une résistante.
Tous ces trésors, et tant d’autres, se trouvent dans les librairies, ces lieux qui ont en plus l’avantage d’être en accès libre, d’être chauffés en hiver, et où l’on peut rester un temps infini à faire des découvertes. En somme, une définition possible du bonheur.
Nelly Kaprièlian
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