Alors que son chapitre final débute tout juste, point d’étape sur une série aussi ambitieuse qu’inégale, qui aura traversé les années 2010 de façon poreuse, et marqué la création télévisuelle contemporaine.
Dans un an, The Walking Dead – série adaptée des romans graphiques de Robert Kirkman, Tony Moore et Charlie Adlard – mettra un point final à son apocalypse zombie chroniquée du point de vue des survivant·es en 11 saisons à l’inspiration et au souffle fluctuants. Diffusé sur OCS, le premier épisode de ce dernier chapitre place les personnages sur leurs axes terminaux, dont l’aboutissement s’annonce chargé en hémoglobine.
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Une fausse fin en forme de mutation
Si les scénaristes sont presque venus à bout de la matière fournie par l’œuvre originale, une série mort-vivante ne saurait s’éteindre aussi franchement, temporisée par une multiplication des épisodes (24 au lieu des 16 habituels). L’Amérique dévastée qu’elle nous a fait sillonner continuera de se dévoiler à travers les spin-offs Fear The Walking Dead et World Beyond, en attendant l’anthologie Tales of the Walking Dead, série dérivée consacrée au duo formé par Daryl et Carol, et la trilogie cinématographique attachée au personnage de Rick Grimes.
Si les premières saisons du show, culminant avec l’affrontement des héros·héroïnes contre le sinistre Gouverneur, avaient remporté une large adhésion grâce à des personnages solides et une mise en scène efficace, elle s’est ensuite lentement affaissée jusqu’à s’embourber dans la longue guerre opposant les communautés d’Alexandria, de la Colline et du Royaume aux Sauveurs du terrifiant Negan. L’accession d’Angela Kang au rang de showrunner au début de la neuvième saison a toutefois permis d’imprimer une tension nouvelle à la corde trop usée en complexifiant la psychologie des personnages (notamment féminins) et en imaginant des scènes d’action plus ludiques.
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Une dernière ligne escarpée
La fin de la saison précédente avait été marquée par la défaite des Chuchoteurs menés par Beta et la capture d’Eugene, Princess et leurs compagnons de route par les soldats armés du mystérieux Commonwealth, qui les avaient attirés à eux grâce à un appel radio. On les retrouve aujourd’hui prisonniers·ières de cette nouvelle communauté très structurée, qui pourrait bien être liée à la disparition de Rick deux saisons plus tôt. Au même moment, Maggie, de retour à Alexandria, prend la tête d’une expédition destinée à récolter des vivres et comprenant Negan, avec lequel la hache de guerre est loin d’être enterrée.
Un nouveau groupe de survivant·es aux intentions troubles, une équipée suicidaire et des plaies impossibles à refermer : l’air est familier et semble pour le moment maintenir la série sur des rails éprouvés. Longtemps relégués à l’arrière-plan au profit de vivants sans cesse revenants (après le retour de Morgan, c’est celui de Maggie qui vient rebattre les cartes), les zombies s’offrent un come-back timide lors de deux séquences cauchemardesques. On les y retrouve agrégés les uns aux autres en un corps collectif grimaçant, ils semblent être devenus la matière même du monde. Car c’est cela qui a toujours été en jeu dans la série : non pas la fin de l’épidémie, mais une normalisation progressive, doublée d’une accoutumance des personnages, qui permettrait à l’humanité de refaire société sur ses cendres. Ou le fameux “vivre avec” ?
Le réel en miroir
Perméable au réel malgré une idéologie difficile à cerner et souvent problématique, The Walking Dead a agrégé au fil de sa décennie d’existence l’imagerie terroriste (les exécutions menées par Negan) et le dérèglement climatique (le terrible hiver de la saison 9), la crise migratoire et la montée des tensions intercommunautaires. Il n’est donc pas impossible que sa résolution fasse écho aux questionnements qui traversent notre présent pandémique.
Du reste, ce qu’elle esquisse pour le monde d’après n’est pas bien rassurant. Ayant pris acte de l’impossibilité de faire société en dehors d’un rapport de violence, le Commonwealth semble incarner un retour de l’autorité et une reprise en main par la loi militaro-policière et le contrôle généralisé. On ne peut qu’espérer pour Daryl, Carol, Maggie, Michonne et leurs compagnons d’infortune qu’un peu de lumière se profile au bout du tunnel.
The Walking Dead, saison 11, d’Angela Kang et Robert Kirkman, avec Norman Reedus, Melissa McBride, Lauren Cohan… Sur OCS Choc.
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