Stanley Kubrick malmène le récit picaresque dans un film visuellement somptueux.
Au XVIIIe siècle, l’ascension sociale du roturier irlandais Redmond Barry, tour à tour soldat, espion, aventurier et qui finit par épouser la comtesse de Lyndon. Après trois films consacrés à l’exploration du futur, et faute de pouvoir monter son Napoléon, Kubrick adapte un roman méconnu de Thackeray. Son ambition : réaliser le chef-d’œuvre du film en costumes. Il pousse le réalisme en éclairant les scènes d’intérieur à la bougie. Avec son chef-op John Alcott, il emploie un objectif 0,7 F Zeiss, habituellement utilisé par la Nasa pour filmer sur la Lune.
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Visuellement somptueux, Barry Lyndon offre, par son mode de narration et sa mise en scène, l’antithèse du cinéma académique. Kubrick y radicalise l’utilisation de la voix off, qui annonce les scènes importantes du film, supprimant ainsi toute tentation émotionnelle. La méticulosité picturale du film contamine le jeu des acteurs, figés dans des masques grimaçants ou une inexpressivité poudrée. Ryan O’Neal, acteur limité, possède la fadeur nécessaire au rôle.
Kubrick malmène les conventions du récit picaresque : son anti-héros arriviste et sans qualités ne gagne la sympathie que vers la fin du film, grâce à ses sentiments paternels sincères, cruellement récompensés par la mort de son fils. Barry Lyndon est un faux film décoratif, tout aussi désespérément lucide au sujet des vanités humaines et des servitudes sociales qu’Orange mécanique ou Shining.
Olivier Père
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