Le personnage principal de ce polar slave, Anatoli, est un frimeur : son détachement face aux événements, face à la vie, à l’amour, à la mort, semble représenter pour lui le summum de l’attitude cool. Et c’est précisément cela qui mine ce film ukrainien, par ailleurs très supportable et qui nous change des affres baroques […]
Le personnage principal de ce polar slave, Anatoli, est un frimeur : son détachement face aux événements, face à la vie, à l’amour, à la mort, semble représenter pour lui le summum de l’attitude cool. Et c’est précisément cela qui mine ce film ukrainien, par ailleurs très supportable et qui nous change des affres baroques et poétiques du cinéma soviétique. Mais donc, cette morgue du personnage, la mine maussade et désabusée qu’il affiche en tout temps et en tout lieu, ne laissent pas de me chiffonner. Bien sûr, le récit est intrigant. Bien que ressassant la rengaine bluesy des habitants-de-l’ex-bloc-de-l’Est-victimes-des-effets-pervers-de-la-société-de-consommation-occidentale, l’histoire est assez alambiquée pour soutenir notre attention. Anatoli, jeune vitellone vivotant de traductions, se fait plaquer par sa femme. On la comprend… Puis, un ami d’Anatoli ayant des accointances avec la mafia locale lui propose les services d’un tueur, si jamais le besoin s’en fait sentir. Alors on pense qu’Anatoli va faire liquider l’amant de sa femme… Mais non, c’est lui-même qu’il désigne comme victime. Puis il se ravise et cherche à interrompre le processus exécutoire. Hélas, la machine à tuer est déjà lancée… On se retrouve là en terrain connu : scénario du suicide par personne interposée à partir duquel Kaurismäki réalisa l’un de ses meilleurs films, J’ai engagé un tueur, avec l’inimitable Jean-Pierre Léaud. Cependant, si les films de Kaurismäki pèchent parfois par une stylisation exagérée, ici c’est le contraire. Un Ami du défunt n’a pas de style : aucune zone d’ombre, une image désespérément télévisuelle, plate comme dans un roman-photo. Plate comme l’encéphalogramme affectif d’Anatoli. En dehors de Vika, la petite prostituée exubérante qui s’accroche à lui et dont il semble se soucier comme d’une guigne, il manque une indispensable étincelle de vie chez les personnages même s’il est surtout question de mort. Et puis comment aimer un film où le héros dédaigne à ce point les femmes qui se jettent à ses pieds ? Notamment la délicate Elena Korikova, véritable tanagra, qui joue la veuve éplorée du défunt du titre. Enfin, le réalisateur Krichtofovitch nous aura au moins permis de constater de visu que l’enthousiasme des Beatles pour les Ukrainiennes dans Back in the USSR était amplement justifié.
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