Lassés de trotter pépère autour de toutes les country, les Walkabouts tentent les grands espaces trip-hop. Des Walkabouts il faudra songer un jour à déchirer la vieille image passée d’un petit combo de country lettrée égaré chez les gros poilus de Seattle. D’abord parce qu’on en a soupé, du déterminisme géographique appliqué arbitrairement à la […]
Lassés de trotter pépère autour de toutes les country, les Walkabouts tentent les grands espaces trip-hop.
Des Walkabouts il faudra songer un jour à déchirer la vieille image passée d’un petit combo de country lettrée égaré chez les gros poilus de Seattle. D’abord parce qu’on en a soupé, du déterminisme géographique appliqué arbitrairement à la création musicale ; ensuite parce que Carla Torgerson et Chris Eckman fidèles en cela à leur réputation de péquenots intellos n’ont jamais rien fait d’autre que de tendre systématiquement des chausse-trappes aux lestes colleurs d’étiquettes que nous sommes trop souvent. Le hic, c’est que cette soif insatiable de nouveauté, ce goût immodéré pour le déguisement de bon aloi, prend le plus souvent des airs tragiques de fuite en avant, vers le néant. Les Walkabouts, on les aura connus tour à tour country-punk (See beautiful rattlesnake gardens), country-rock (New West Motel), country-grunge (Setting the woods on fire) ou country-nue (Life full of holes), mais le plus souvent désespérément country-rien. Bons derniers du cortège carnavalesque. Avec leur songwriting format Lilliput et leur bonne volonté débordante, ils sont comme un vieux camarade encombrant qu’on n’aime plus que du bout des lèvres, que du bout du coeur. Le genre à toujours raconter la même blague éculée, plus ou moins rafistolée pour l’occasion, sauf à en faucher de nouvelles au répertoire (voir Satisfied mind, album de reprises en forme d’aveu somptueux d’impuissance). Le pire, c’est qu’on s’en veut toujours de dire du mal des Walkabouts. Ainsi de leur avant-dernier album, Devil’s road pudding de violons assez indigeste, concocté par Victor Van Vugt, ci-devant producteur de Nick Cave , vessie orchestrale qu’on aurait volontiers pris pour une lanterne de chef-d’oeuvre.
Cette fois, avec Nighttown, lassés de cette bourbe qui leur colle depuis toujours aux sabots, Carla Torgerson et Chris Eckman prennent en marche le train du trip-hop, à touches homéopathiques de loops, de samples et de claviers Moog. Furieusement dans le vent, les Walkabouts, d’autant que sur un Follow me an angel de moite consistance, ou sur un Unwind suant la classe, la greffe fonctionne à merveille. Pourtant, sur la longueur, même versée dans la soul ivoirine, éclairée aux néons des ghettos, cette musique petits bras ne parvient jamais à transcender le décor grandiloquent qui l’étouffe à petit feu. Sur Nighttown, les chansons des Walkabouts restent des chansons des Walkabouts, étranglées, corsetées, vouées aux gémonies de leur petite condition. C’est là tout le drame du groupe : on ne l’apprécie que par raison, un rien gênés. Lui préférerait sans doute qu’on le déteste passionnément.
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